Liberté d’expression : la F1 ‘veut faire taire’ Hamilton selon une ONG
La liberté d’expression fait parler
C’est un autre chantier que la FIA (et la F1) devront gérer en cette saison 2023 : les nouvelles règles, plus restrictives, en matière de liberté d’expression des pilotes, et qui instaurent une sorte de censure préalable en F1 (voir notre article).
Et la pression commence déjà à monter sur ce sujet.
Le Bahrain Institute for Rights and Democracy (Bird), ONG basée à Londres et qui travaille pour les droits humains à Bahreïn, lieu d’accueil bien sûr d’un Grand Prix en F1, a ainsi dénoncé ce qui serait, selon elle, un véritable recul en matière de liberté d’expression.
L’association avance que les nouvelles règles empêcheront les pilotes « de faire entendre leurs voix sur des sujets comme le racisme et les droits humains. »
Selon BIRD, qui s’adressait à la FIA, il s’agirait même d’une « réaction face à l’attitude de certains pilotes, en particulier de Lewis Hamilton, qui font part de leurs inquiétudes quant aux pays choisis pour les courses de F1, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l’homme dans les pays hôtes, et qui interviennent avec force là où votre propre organisation [la FIA] est restée silencieuse » (on sait combien Sebastian Vettel et Lewis Hamilton ont été actifs récemment, avec leurs prises de position sur l’environnement ou le racisme).
« [Lewis Hamilton] a utilisé sa plateforme pour exprimer son soutien à Black Lives Matter et aux droits de l’homme dans des pays dont le bilan en matière de droits de l’homme est problématique, notamment le Bahreïn et l’Arabie saoudite » poursuit l’association.
Son directeur, Sayed Ahmed Alwadaei, rappelle, dans une lettre consultée par la BBC que la FIA, qui entend limiter les prises de position politiques, devrait, pour résumer, d’abord se regarder dans le miroir.
« Tout au long de sa carrière, aucune des déclarations d’Hamilton ne peut être considérée comme plus politique que la décision de la FIA de ne pas courir en Russie lors de la dernière saison en raison de l’invasion de l’Ukraine. »
Et le directeur de l’association de s’adresser directement à Mohammed Ben Sulayem...
« Dans votre propre déclaration l’année dernière, vous avez condamné l’invasion russe et exprimé votre "tristesse et votre choc" pour les victimes en Ukraine. Bien que j’applaudisse cette déclaration, il s’agit clairement d’une déclaration politique. »
S’expliquant plus en détail au micro de la BBC, Sayed Ahmed Alwadaei a remis cette nouvelle règle relative à la liberté d’expression dans son contexte, c’est-à-dire dans la multiplication des courses de F1 au Moyen-Orient (avec des Grands Prix au Qatar, en Arabie saoudite, à Bahreïn ou aux Émirats Arabes Unis).
Trop de politique tuerait-elle le business ? Alwadaei vise d’ailleurs autant la FOM que la FIA et son président Mohammed Ben Sulayem...
« Lorsque la FIA et la F1 choisissent d’accorder des courses à certains des régimes les plus répressifs du monde, comme le Bahreïn et l’Arabie Saoudite, elles facilitent le blanchiment de régimes par le sport, et permettent à ces dictatures de blanchir leurs horribles bilans en matière de droits. »
« Il est très inquiétant de voir que la FIA imite maintenant les tactiques de ses partenaires commerciaux despotiques en tentant de museler les voix des critiques et des défenseurs. »
« La FIA et la F1 ont échoué, avec des pilotes comme Lewis Hamilton qui se sont levés et ont dénoncé les abus, et son soutien marquant aux prisonniers politiques de Bahreïn a permis de faire la lumière sur une injustice effroyable. »
« Aujourd’hui, la FIA veut le faire taire, lui et d’autres, et les punir s’ils osent s’exprimer. Nous disons à Mohammed Ben Sulayem que cette politique est mauvaise et qu’elle doit être inversée immédiatement. »
Des promesses non tenues
Alwadei paraît presque regretter l’ère Jean Todt, en rappelant que « nous avions reçu [en mars 2021] l’assurance encourageante que votre prédécesseur tenait à ce que la FIA adopte une politique des droits de l’homme. »
Mais cet engagement n’avait jamais été vraiment tenu, conclut-il : « Malheureusement, la présidence de Jean Todt s’est terminée sans qu’une politique des droits de l’homme ait été mise en place et il n’est pas clair si la FIA y travaille encore sous votre direction ou non. »
Le premier Grand Prix de la saison sera d’ailleurs celui à Bahreïn, début mars prochain : il promet d’être animé en coulisses…
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