Comment une ’bêtise’ a coûté 3 millions d’euros à Coulthard en 1995
Un accident évitable qui l’a empêché de toucher une belle prime
David Coulthard était un pilote très rapide en début de carrière, mais l’Ecossais s’était illustré par plusieurs erreurs absurdes, qui lui avaient donné l’image d’un compétiteur maladroit. Il avait notamment fait un tête-à-queue pendant le tour de formation du Grand Prix d’Italie 1995 alors qu’il était en pole position.
Pire, il avait abandonné au Grand Prix d’Australie 1995 après un accident en entrant dans la voie des stands, alors qu’il était en tête de la course. Mais 30 ans après les faits, il révèle qu’il avait subi un problème mécanique, qu’il n’avait pas su gérer par manque d’expérience.
"À la fin de l’année 1995, lors de la course d’Adélaïde, je menais très facilement devant Damon quand je suis rentré aux stands et que j’ai rétrogradé" a raconté Coulthard à PlanetF1.
"Quand je suis passé en seconde, l’autoblip (le système d’accélération automatique au rétrogradage) a fait un surrégime, ce qui n’était pas normal, et ça a poussé la voiture vers l’avant. Et là, il n’y avait absolument aucune marge d’erreur, et j’ai percuté le mur des stands."
"C’était un problème électronique, suivi d’une erreur de pilotage parce que je ne m’attendais pas à ce problème électronique. J’étais tranquille. Avec l’expérience, on rentrerait un peu plus lentement, juste au cas où. Mais si tu fais chaque virage en te disant ’au cas où’, tu ne réalises jamais un bon chrono."
"Donc oui, j’ai fini dans la poussière. Mais j’ai fini dans la poussière parce que, quand je suis passé en seconde, au lieu de simplement rétrograder, il n’y avait aucune marge. On fait des bêtises comme ça."
L’accident a eu des conséquences financières pour Coulthard, dont la cote aurait été plus élevée s’il avait remporté une deuxième course dans cette année 1995, après sa première victoire au Portugal, alors qu’il partait chez McLaren l’année suivante.
"Si j’avais remporté cette course, j’aurais touché un bonus d’un demi-million de livres sterling. Le bonus de victoire était d’un demi-million, donc j’avais gagné à Estoril et, si j’avais gagné à Adélaïde, j’aurais eu droit à un autre demi-million."
"Le problème, c’est que si j’avais remporté deux courses en 1995, McLaren m’aurait versé un million de dollars supplémentaires chaque année de mon contrat pour 1996 et 1997. Cet accident m’a donc coûté deux millions et demi de livres sterling (environ 3 millions d’euros, ndlr) !"
L’Ecossais pense qu’il aurait pu avoir davantage de bons résultats avec Williams en 1995, mais son inexpérience, la présence de Damon Hill et la concurrence de Michael Schumacher n’ont pas aidé : "La voiture de 1995 était une super voiture, je l’adorais. Mais je manquais d’expérience, de fiabilité, plusieurs facteurs entraient en jeu, et Michael est arrivé."
"Un exemple dont je me souviens, c’est à Suzuka : la piste était à moitié mouillée, à moitié sèche. Je me suis légèrement décalé de la trajectoire dans le virage de Spoon, je suis passé dans les graviers, puis je suis revenu sur la piste. Ensuite, je suis arrivé dans le 130R et, comme c’était un peu humide, au lieu de passer à fond, il fallait freiner.
"Et là, tous les graviers sont sortis des pontons, et j’ai fini par partir en tête-à-queue à cause de mes propres graviers. Je n’avais jamais vécu ça de ma vie, parce que je n’étais jamais allé dans les graviers pour en ressortir. Quand tu faisais ça en essais, on n’avait des graviers que quand on sortait un peu de la trajectoire, et ils s’évacuaient."
"Mais là, comme c’était en course, j’ai juste appuyé à fond. Avec le recul, si j’avais ralenti et viré sur le côté comme en essais, j’aurais perdu deux secondes de plus, oui, mais je ne me serais pas retrouvé à partir en tête-à-queue dans 130R. Comment aurais-je pu le savoir avant que ça arrive ?"
Coulthard explique comment il a quitté Williams fin 1995 pour McLaren, alors qu’il avait normalement un contrat pour deux ans courant jusqu’à la fin de l’année suivant. Mais son manager, Mark McCormack, a fait valoir à Frank Williams qu’il n’avait pas signé un contrat valide avec Coulthard pour 1996, et le choix était fait de partir vers McLaren.
"Tout ce différend contractuel est né du fait que j’ai disputé les huit courses en 1994, et qu’ensuite, ils avaient évidemment le choix entre Nigel [Mansell] et moi" s’est souvenu Coulthard.
"Ils ont décidé de me choisir, nous nous sommes mis d’accord sur un contrat de deux ans pour 1995 et 1996, et nous devions le signer le 28 décembre, ou quelque chose comme ça. Il [Frank Williams] rencontrait des difficultés avec Damon, dont le manager disait ’attendez, Damon a été signé au même niveau qu’Ayrton’."
"C’est toujours une question d’argent. Je pense que Frank en a juste eu marre des pilotes, et même si nous nous étions mis d’accord et que nous étions prêts à signer un contrat de deux ans, il a dit ’j’ai changé d’avis’."
"Alors l’avocat, Peter Goodman, a dû raturer 1996, et nous avons signé ce contrat modifié à la main pour 1995. Comme nous avions déjà parlé avec Ron [Dennis] pendant 1994, il voulait en fait nous avoir pour 1995."
"J’étais donc toujours censé être chez Williams pour 1995, mais je pensais que ce serait aussi pour 1996. Quand ils ont changé d’avis à propos du contrat de deux ans, nous avons appelé Ron et nous sommes allés chez McLaren pour signer pour 1996 et 1997."
"Donc, à la fin de 1994, j’ai signé un contrat d’un an, modifié à la main, avec Williams, puis un contrat de deux ans avec McLaren. À mi-saison 1995, Frank m’a dit ’je veux que tu restes pour l’année prochaine’."
"Je lui ai répondu ’je ne peux pas, nous avons signé chez McLaren’, et il a dit ’j’ai un contrat de deux ans avec toi’. J’ai répondu ’comme vous vous en souvenez, vous l’avez changé en un an’. Et ensuite, il a essayé de faire valoir que le contrat d’essais, qui était une sorte de contrat renouvelable, restait valide."
"Il a essayé de faire en sorte que le Contract Recognition Board (CRB) impose le contrat d’essais. Bien sûr, le CRB a dit ’ce contrat a été remplacé par le nouveau contrat de course de 1995 (celui avec 1996 raturé), que nous avons en notre possession’, et ils ont donc conclu ’vous n’avez pas ce contrat d’essais pluriannuel’."
"Cela a fait que, pendant la deuxième moitié de la saison 1995 avec Williams, Patrick [Head] était un peu contrarié par la situation, mais il ne comprenait simplement pas ce qui s’était passé en 1994."
"Si Frank avait simplement respecté, et ce n’est pas une critique, ce que nous avions négocié, j’aurais passé 1995 et 1996, et probablement au-delà, avec Williams, et McLaren aurait trouvé une autre solution."
"Donc, cela a un peu terni la fin de ma relation avec Williams. Mais Frank a toujours été un gentleman à ce sujet ; même après la décision du CRB, il a dit ’j’ai beaucoup apprécié être contre-interrogé’."
"Puis j’ai pris son avion pour le Grand Prix suivant ! Frank savait débattre d’un désaccord de manière très polie, puis passer à autre chose, alors que certaines personnes gardent une rancune éternelle. Je n’ai que du respect pour Frank et l’équipe Williams, qui ont lancé ma carrière."
"Il a certainement donné leur chance à beaucoup de jeunes pilotes, donc à des pilotes peu coûteux. Mais, quand il fallait investir, quand il a pu avoir Ayrton, il a pris Ayrton. Je pense que probablement, perdre Nigel [Mansell]… il est parti à cause de discussions sur l’argent, mais c’était l’argent de Frank qu’il dépensait."
"Donc, contrairement à Ron, ou à d’autres équipes où la moitié du salaire était payée par Marlboro et l’autre moitié par le partenaire moteur… en réalité, Mika [Häkkinen] et moi étions payés par Mercedes et Marlboro [chez McLaren]. Bien sûr, si l’argent allait à nous, il n’allait pas à l’équipe."
"Mais pour Ron, il avait son budget d’équipe, et dans ce budget, il n’avait pas à payer les pilotes. Tandis que Frank, je soupçonne qu’il payait beaucoup ses pilotes. C’était donc de l’argent qu’il ne pouvait pas consacrer à l’ingénierie."
"Je n’ai que du respect pour l’opportunité que m’ont offerte Williams puis McLaren. McLaren avait une approche et une atmosphère très différentes, mais cela me convenait, et j’y ai passé neuf saisons, une longue période avec une seule équipe !"
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