Les hauts et les bas de Mattia Binotto à la tête de la Scuderia Ferrari

Quatre années marquées par des promesses mais aussi des échecs

Par Paul Gombeaud

29 novembre 2022 - 17:36
Les hauts et les bas de Mattia (...)

Après des semaines de spéculations, Ferrari a confirmé ce mardi le départ de Mattia Binotto du poste de directeur de l’équipe. Le Suisse, qui avait rejoint la Scuderia au milieu des années 1990, a démissionné de ses fonctions.

Binotto rejoignait dans un premier temps la Scuderia en qualité d’ingénieur moteur, ce qui lui a notamment permis de travailler en étroite collaboration avec Michael Schumacher, avant de devenir directeur technique puis directeur de l’équipe en 2019. Nous vous proposons ainsi un bilan de ses quatre années passées à la tête de l’écurie italienne.

2019 : Une première saison encourageante

A quelques semaines seulement du début de la saison 2019, Ferrari annonce le 7 Janvier que Maurizio Arrivabene, son directeur d’équipe, est sur le départ et qu’il est remplacé par Mattia Binotto. Après les échecs de 2017 et 2018, c’est donc à ce dernier que revient la mission périlleuse de ramener son premier titre à la Scuderia depuis 2008.

Les questions autour de Binotto étaient alors nombreuses : l’ingénieur n’avait certes plus à prouver son apport dans les départements moteur et châssis de Maranello, mais était-il l’homme de la situation pour diriger l’équipe ?

La SF-90 était une monoplace rapide en 2019, mais pas suffisamment pour mettre fin à l’hégémonie de Mercedes F1 au championnat du monde. Sebastian Vettel et la recrue Charles Leclerc décrochaient de nombreux podiums mais aucune victoire durant la première partie de la saison, le Monégasque ayant même perdu un premier succès en F1 à Bahreïn lorsque son moteur commençait à perdre de la puissance. Vettel s’estimera pour sa part volé au Canada après avoir été pénalisé pour avoir bloqué Hamilton en revenant sur la piste.

Mais les promesses étaient finalement confirmées avec trois victoires consécutives en deuxième partie d’exercice : deux pour Leclerc à Spa et à Monza, où les tifosi étaient en folie avec cette première victoire à domicile depuis 2010, et une pour Vettel à Singapour où la Scuderia signait aussi le doublé.

La fin de saison fut moins glorieuse avec aucun autre succès décroché et un accrochage fratricide au Brésil, mais Binotto pouvait tout de même tirer de la satisfaction de sa première année à la tête de la Scuderia, avec trois courses remportées et la deuxième place assurée au championnat des constructeurs.

Il avait d’ailleurs déclaré après cette première saison en tant que directeur d’équipe : "Cela a certainement été une saison intense avec beaucoup de choses à faire. Nous avons restructuré et réorganisé l’équipe. Dans le même temps, nous avons toujours essayé d’aborder et d’améliorer la voiture et je pense que nous l’avons fait tout au long de la saison, du moins à un certain niveau."

"Aucun changement majeur n’est nécessaire, c’est une question d’expérience. Nous avons toujours dit que nous étions une nouvelle équipe, en particulier dans les rôles clés, et nous sommes sur une courbe d’apprentissage très raide."

2020 : Premières (très) grandes difficultés

Avec une première saison encourageante, Binotto connaissait une année bien plus mouvementée en 2020, sur la piste comme en dehors. A commencer par des tensions avec Sebastian Vettel.

Bien avant que la saison ne commence, celle-ci ayant été repoussée de plusieurs mois en raison de la pandémie mondiale de Covid-19, des questions se posaient quant à la hiérarchie des pilotes en interne : Binotto laissait entendre en 2019 que Vettel était le pilote leader de par son statut et son expérience, mais affirmait en 2020 que lui et Leclerc seraient cette fois traités à égalité.

La séparation avec le quadruple champion du monde en fin de saison était finalement officialisée quelques mois plus tard, et ce avant même que le premier Grand Prix en Autriche ne soit disputé. Binotto déclarait alors : "C’est une décision prise conjointement par nous et Sebastian, une décision que les deux parties estiment être la meilleure. Ce n’était pas une décision facile à prendre étant donné la valeur de Sebastian en tant que pilote et en tant que personne."

La dernière saison de l’Allemand avec la Scuderia sera finalement désastreuse avec une 13e place au championnat, tandis que la gestion de son cas en interne pose question dans le paddock de la F1.

D’autant que le bilan sportif de 2020 sera désastreux : la deuxième place de Leclerc lors de la course inaugurale sera le meilleur résultat de la saison, tandis que Ferrari termine seulement sixième au championnat des constructeurs, son pire classement depuis 40 ans.

2021 : Une année pour préparer les nouveaux règlements

Alors que Carlos Sainz est arrivé pour remplacer Vettel, Binotto savait début 2021 que Ferrari ne pourrait pas se permettre de réaliser une campagne aussi désastreuse que la précédente. Il admettait d’ailleurs que Ferrari avait touché le fond en 2020.

"Il est certain que l’année dernière a été une grosse, grosse déception. Nous savons que nous ne pouvons pas répéter un si mauvais résultat. Nous devons, d’une manière ou d’une autre, faire mieux en 2021 et c’est ce que j’attends."

Mais si la SF21 de Ferrari est en effet bien meilleure que sa devancière, elle est encore loin de pouvoir tenir le rythme des monoplaces produites par Mercedes F1 et Red Bull qui luttaient pour les titres mondiaux.

Comprenant rapidement qu’il serait impossible de lutter pour le titre, Binotto et Ferrari prenaient ainsi la décision de se concentrer sur les nouveaux règlements de 2022 qui promettaient de bouleverser la hiérarchie.

Ferrari terminait finalement une deuxième saison consécutive sans remporter le moindre succès, mais obtenait tout de même cinq podiums et surtout la troisième place au championnat des constructeurs, bien plus digne de son statut.

Pour Binotto, terminer troisième était alors "encourageant, car c’est une confirmation que l’équipe a en quelque sorte progressé et va dans la bonne direction."

2022 : Un début de saison parfait suivi d’un départ en fin d’année

Après deux saisons vécues dans un relatif anonymat, Ferrari revenait en force en 2022 alors que son choix de sacrifier 2021 pour les nouveaux règlements s’avérait excellent, du moins au début.

Suite à des essais de présaison prometteurs pour la F1-75, Charles Leclerc et Ferrari débutaient leur campagne à la perfection avec un doublé à Bahreïn, tandis que leurs principaux rivaux, Red Bull, perdaient leurs deux voitures à cause de problèmes de fiabilités tardifs.

Une deuxième victoire du Monégasque en Australie, encore une fois couplée à un abandon de Max Verstappen, ne faisait qu’augmenter les attentes autour de la Scuderia alors que beaucoup voyaient l’équipe de Binotto capable de lutter pour le titre.

Mais après ce départ de rêve, le retour sur terre fut très compliqué : problèmes de fiabilité, erreurs stratégiques, fautes de pilotage, soit autant de frustrations qui s’enchainaient pendant que Verstappen et Red Bull enchainaient les victoires et s’envolaient aux championnats.

Ferrari remportait ainsi quatre victoires lors des 11 premiers Grands Prix de la saison, puis plus rien lors des 11 suivants. Sa deuxième place au championnat des constructeurs était même menacée par Mercedes F1 en fin de saison, l’écurie allemande ayant régulièrement été plus rapide que la Scuderia durant la deuxième partie de l’année.

Quant à Mattia Binotto, les rumeurs sur son sort s’accéléraient dans les médias italiens en fin de saison, les belles promesses du début d’année n’ayant pas été tenues. Ces rumeurs étaient dans un premier temps démenties car jugées "totalement sans fondement," mais elle n’ont fait que s’intensifier.

Et finalement, il était officialisé ce mardi 29 Novembre que Binotto avait décidé de démissionner de son poste et qu’il quitterait officiellement Maranello à la fin de l’année.

"Avec le regret que cela implique, j’ai décidé de mettre un terme à ma collaboration avec Ferrari. Je quitte une entreprise que j’aime, dont je fais partie depuis 28 ans, avec la sérénité que procure la conviction d’avoir tout mis en œuvre pour atteindre les objectifs fixés," déclarait Binotto.

"Je quitte une équipe unie et en pleine croissance. Une équipe forte, prête, j’en suis sûr, à atteindre les objectifs les plus élevés, à laquelle je souhaite le meilleur pour l’avenir. Je pense qu’il est juste de le faire maintenant, aussi difficile que cette décision ait été pour moi. Je tiens à remercier toutes les personnes de la Gestione Sportiva qui ont partagé avec moi ce parcours, fait de difficultés mais aussi de grandes satisfactions."

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