Wolff : C’est parce que nous avons souffert que nous avons gagné
Tout ce qui ne vous tue pas…
Toto Wolff est le patron de la semaine et même de l’année en sport auto. Le directeur de Mercedes a réussi l’exploit de conserver la couronne mondiale en F1 malgré un changement profond de règlement. Il reste encore à assurer le titre de Lewis Hamilton, mais ce n’est plus maintenant qu’une formalité.
« C’est un sentiment fabuleux, bien sûr ! Quand nous avons fixé nos objectifs au début de l’année, nous voulions gagner les deux championnats de nouveau, et être la première équipe à le faire après un changement très important dans le règlement. L’avoir réussi, à Austin, à trois courses de la fin, c’est un sentiment vraiment incroyable. C’est la récompense pour tant de gens qui ont travaillé si dur pour ce succès. Oui, vous essayez toujours d’identifier les points qui peuvent faire la différence, mais en fait, il n’y a rien de tel qu’une dynamique formidable dans l’équipe… Nous prenons du plaisir à faire ce que nous faisons. »
La victoire de Mercedes hier fut aussi acquise grâce à une stratégie plus prudente que celle de Ferrari, même si faire un arrêt de moins a finalement coûté le podium à Valtteri Bottas. Toto Wolff nous plonge dans les coulisses de ce dilemme.
« C’était la première fois depuis longtemps qu’il n’y avait pas clairement de meilleure stratégie » confirme Toto Wolff. « Nous avions une avance d’environ 5 secondes avec Lewis sur Sebastian et c’était suffisant pour faire rentrer d’abord Valtteri pour protéger sa position. Sebastian a fait un tour de sortie magnifique et son arrêt aux stands était bon, donc c’était vraiment serré. Donc dans le futur, nous devrons probablement être un peu plus prudents dans ce genre de situation. »
« Nous n’étions pas du tout à l’aise. A 25 tours de l’arrivée, nous ne savions pas clairement si Vettel était sur une stratégie à un ou deux arrêts. Et Ferrari parlait toujours à Seb, pour lui dire qu’il devait faire durer les pneus jusqu’à la fin, mais le plan, en réalité, c’était une stratégie à deux arrêts. Quand Seb est rentré aux stands, alors, il fallait décider s’il fallait le couvrir ou non, parce qu’il est l‘ennemi, ou s’il fallait s’en tenir à nos propres simulations, s’en tenir à nos plans. »
« C’est une décision prise sur le muret des stands, avec le soutien de notre équipe à Brackley. Pour les stratégistes, avoir le courage de rappeler les pilotes au bon moment n’est jamais facile puisque vous êtes en première ligne. Et nous avons une équipe qui est presque parfaite sur ce point. Nous n’avons fait que quelques mauvais choix cette saison. C’est l’une des forces de cette équipe. »
Lewis Hamilton n’a plus qu’une 5e place à assurer s’il veut être titré – à réaliser lors de l’une des trois courses. Toto Wolff imagine-t-il un scénario dans lequel Sebastian Vettel serait titré ?
« Je peux imaginer tous les scénarios. C’est le sport auto. Pensez-y simplement : l’abandon de Sebastian à Singapour… puis sa 4e place à Sepang… et ensuite son abandon à Suzuka… donc rien n’est fait tant que ce n’est pas mathématiquement acquis. »
La victoire de Mercedes au classement des constructeurs n’avait pourtant rien d’une évidence, lorsque l’on se rappelle les déboires de l’écurie à Monaco ou en Hongrie. Toto Wolff a-t-il eu peur de voir le titre lui échapper à ce moment ?
« Laissez-moi vous rappeler : nous avons une devise dans l’équipe. Lorsque nous connaissons des jours difficiles, ce sont nos concurrents qui ont des regrets. Parce que les expériences douloureuses vous rendent tellement plus forts. Si vous restez calme et si vous analysez quels sont vos problèmes, et si vous les éliminez, alors vous avez plus de savoir, plus de connaissances, plus de force. Nous l’avons particulièrement vu cette année. Ces expériences douloureuses nous ont fait remporter le titre. »
C’est aussi Lewis Hamilton qui a permis à Mercedes de remporter ce titre, plus qu’un Valtteri Bottas en retrait depuis la pause estivale. Toto Wolff révèle que le Finlandais a particulièrement souffert avec ses pneus hier.
« Au début Valtteri a livré une bataille formidable contre Daniel Ricciardo mais ensuite, il a géré ses pneus, oscillant entre performance pure et préservation des gommes – puisqu’il souffre avec les pneus de cette année. C’était vraiment une mauvaise expérience. Au départ, il avait l’air plutôt pas mal, mais ensuite, il a perdu pied quand il a connu de nouveau ses problèmes de pneus – il a le ‘blues’ des pneus… »
« Je travaille avec Lewis depuis maintenant cinq ans et je ne l’ai jamais vu à ce niveau. Son rythme pur était spectaculaire. Comprendre les pneus et les capacités de cette voiture, ce n’est parfois pas facile. Avoir une performance d’un tel niveau, malgré tout… je ne l’ai jamais vu chez lui avant ! »
Pourtant, à la fin de la saison dernière, Lewis Hamilton avait conclu sur une polémique avec Mercedes en ralentissant Nico Rosberg. Qu’est-ce qui a changé depuis ?
« Mon opinion personnelle, c’est que nous avons eu un moment difficile l’an dernier à Abu Dhabi, et nous sommes revenus deux jours plus tard, pour tout évoquer dans ma cuisine. Toutes les frustrations, les questions qui étaient nées pendant ces années, ont été mises sur la table, et il est revenu avec un état d’esprit formidable, qui s’est renforcé de mois en mois. Et vous pouvez aussi voir la relation formidable qu’il a avec Valtteri, c’est un facteur important. L’esprit dans l’équipe est formidable. C’est ce qui nous fait de nous des gagnants ! »