Hamilton, Stewart, Watson, Jarier, Pescarolo… ils se souviennent de Lauda

Comme pilote, comme homme d’affaires, et comme homme tout simplement

Par Alexandre C.

22 mai 2019 - 08:42
Hamilton, Stewart, Watson, Jarier, (...)

Le décès, dans la nuit de lundi à mardi, de Niki Lauda, a provoqué une vague immense de réactions, qui font aujourd’hui prendre un peu plus conscience de la place qu’occupait l’Autrichien dans l’histoire de la F1.

Lewis Hamilton, pilote Mercedes F1, a attendu plusieurs heures et a finalement publié tard hier soir un message sur son compte Instagram, évidemment élogieux envers celui qui l’a approché pour piloter chez Mercedes.

"Mon ami, j’ai dû mal à croire que tu es parti. Nos conversations, nos rires, nos accolades après les victoires vont me manquer. Cela a été un véritable honneur de travail à tes côtés durant ces sept années. Je n’aurais jamais été présent dans cette équipe sans toi. Que Dieu garde ton âme en paix. Merci d’avoir été une lumière vive dans ma vie. Je serai toujours là pour ta famille si elle a besoin de moi. Je t’aime mon gars, ton ami pour toujours, Lewis."

Sir Jackie Stewart, triple champion du monde comme Lauda aussi, a eu une formule juste pour évoquer le grave accident de l’Autrichien en 1976 : « Durant cet accident, il est mort deux fois et a été ressuscité. »

L’Ecossais commentait le Grand Prix d’Italie 1976, qui vit le retour surprise, et surtout rapide, de Lauda à la compétition. Et se souvient : « Il n’aurait pas dû être là, mais il voulait recourir à nouveau. Je ne l’oublierai jamais : il avait mis son casque, il souffrait énormément. A la fin de la course, le sang coulait de son casque. »

« C’est une nouvelle très triste. Je connaissais Niki depuis longtemps, et il a juste commencé la course quand j’ai pris ma retraite. Nous avons couru ensemble une saison. Il a toujours été d’une grande intégrité et était l’un des pilotes au pilotage le plus coulé que je connaisse. »

John Marshall Watson, ancien coéquipier de Lauda chez Brabham puis chez McLaren, a également trouvé les mots pour évoquer la disparition de son coéquipier et ami.

Watson raconte notamment le fameux accident du Grand Prix d’Allemagne 1976, dans « l’enfer vert ».

« Je suis arrivé peu après l’accident et les autres pilotes qui étaient là essayaient de le faire sortir du cockpit. Nous l’avons étendu au sol et il pouvait communiquer. Personne n’a alors pris conscience des blessures réelles de Niki. Le danger réel, ce n’était pas les blessures superficielles que nous pouvions voir, mais la blessure plus profonde à son poumon. Ce n’est que deux ou trois jours après que la nouvelle de cette blessure grave au poumon est sortie, et c’est alors que nous avons appris que sa vie était en danger. »

« Courir 40 jours après cet accident, c’était l’acte le plus courageux d’un sportif que j’aie jamais vu. Ce qui était plus remarquable encore, c’était la vitesse avec laquelle il a récupéré, et ce qu’il a pu réussir ensuite. »

« Son courage, sa détermination, son engagement, son sang-froid… Tous ceux à l’état d’esprit négatif disaient ‘Lauda est fini’, mais sa santé et sa condition, à Monza, étaient juste remarquables. »

Plus jeune de cinq décennies que Watson, le jeune Billy Monger a lui aussi connu un grave accident en monoplace, qui l’a amputé des jambes. Il raconte avoir rencontré Niki Lauda dans le garage Mercedes, à Silverstone, quelques mois après son accident en 2017…

« Il m’a dit tant de choses agréables et gentilles à mon propos. Il pouvait vraiment faire le lien entre ma situation et sa détermination à revenir dans le sport auto, après avoir connu un accident grave. C’est une nouvelle très triste, le sport auto a perdu l’une de ses véritables légendes. »

Damon Hill, champion du monde 1996 pour Williams, a rappelé que Niki Lauda « était l’un des seuls à pouvoir s’asseoir avec Enzo Ferrari et Bernie Ecclestone, à les regarder droit dans les yeux. Ils savaient qu’il était dur en affaires. C’était un homme remarquable, à tous égards. »

« Un homme formidable, déterminé, résolu, talentueux, passionné, franc, honnête, humble et d’une compagnie formidable » a pour sa part réagi l’ancien pilote McLaren, Martin Brundle.

Le président de la FIA, Jean Todt, a eu également des mots attentionnés : « Niki Lauda était un héros du sport automobile, qui m’a inspiré dans ma jeunesse. Il est une étape importante dans l’histoire de la F1. Toutes mes pensées vont à sa famille, ses amis et Mercedes. »

Henri Pescarolo, sur les ondes d’Europe 1, a tenu un témoignage plus incisif. Le Français a couru avec Lauda en Formule 2 et Formule 3. Et son témoignage est franc…

« Ce que je retiens, c’est qu’il ne m’a pas du tout impressionné quand il était contre moi en Formule 2 et en Formule 3. Je n’aurais jamais imaginé que c’était un futur champion du monde. J’étais même assez souvent plus rapide que lui. Il a explosé en sortant de BRM, quand il a été pris par Ferrari, où il est devenu le Niki Lauda que l’on connaît, c’est-à-dire un pilote assez sensationnel, un meneur d’hommes. Il a ramené Ferrari au titre de champion du monde.

« Quand on a été trois fois champion du monde, on marque quand même l’histoire de son sport. Il fait partie des très grands pilotes. Il s’est battu contre les meilleurs, Alain Prost en particulier. Après son retour à la compétition, il s’est retrouvé face à Alain chez McLaren, et il à nouveau été champion du monde, en le battant d’un demi-point. C’est l’un des grands de l’histoire de la Formule 1. C’était un immense pilote et un immense talent, et un chef d’entreprise assez étonnant. Il a marqué une époque du sport automobile en général, et de la Formule 1 en particulier. »

Jean-Pierre Jarier, qui a couru contre Niki Lauda durant sa carrière, a lui été interrogé par France Info.

« C’était un pilote exceptionnel. Le seul problème qu’il a eu, c’est son accident sur le circuit du Nürburgring. Je suis arrivé quelques instants après sur les lieux. Il avait respiré de l’air à 800 degrés de température, de l’air avec de l’essence etc... Tout le monde pensait qu’il était mort. Sauf qu’il a eu des séquelles, et en vieillissant il avait de moins en moins d’aptitudes pour respirer facilement et donc, ça a fini par mal tourner. Sa vie, c’est un combat, c’est une lutte étonnante. C’est un garçon phénoménal. »

« Il a eu l’extrême onction. Ça veut dire que plus personne ne croyait à sa survie. Il est quand même revenu dans la course avec des résultats magnifiques et ça, c’est absolument invraisemblable. Il avait changé un petit peu, psychologiquement, dans son approche de la course et il a refusé, par exemple, au Grand Prix du Japon, de conduire la voiture dans des conditions affreuses. Ça lui a coûté le championnat du monde, sinon c’était lui. Il tenait encore plus à sa vie après avoir failli la perdre précédemment. »

« Je suis extrêmement attristé de le voir disparaître. J’espère qu’il n’a pas souffert. Cela me fait du mal de voir que les uns après les autres, les pilotes de course disparaissent. J’ai connu plein d’aventures avec lui en dehors de la course, c’était super sympa. La F1 des pilotes a perdu Niki Lauda. A l’époque, c’était avant tout un championnat de pilotes, avec des voitures qui n’étaient pas réglées aujourd’hui par des ingénieurs. C’était un autre monde, et cet autre monde est terminé. Lui, c’était un marqueur de l’ancienne époque. C’est une époque qui s’éteint un peu plus avec lui. »

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