Technique : Les lubrifiants en Formule 1 (Partie 2)

Un vaste champ d’exploration

Par Franck Drui

25 avril 2014 - 16:30
Technique : Les lubrifiants en (…)

Evacuer l’air

La lubrification d’un moteur F1 s’effectue par carter sec afin d’abaisser le centre de gravité du moteur (la réserve d’huile est séparée du bloc moteur). Or, l’huile subit un brassage important, et peut emmagasiner des bulles d’air ou de gaz de combustion. Cette situation affecte alors les caractéristiques de compressibilité du lubrifiant. Un mélange d’air et d’huile conduit notamment à une baisse de pression, éventuellement à un temps de réponse plus lent, par exemple sur les commandes hydrauliques, et à des épaisseurs d’huile plus faibles que prévu entre les pièces en mouvement. Elle modifie également les conditions d’équilibre thermique : l’air est un isolant et si un matelas d’air est constitué, la gêne occasionnée pour l’évacuation des calories peut se révéler fatale à certains organes. De plus le niveau d’huile résiduel augmente et favorise l’apparition du barbotage des organes mécaniques en rotation, synonyme de perte de puissance non négligeable.

Avoir une grande stabilité thermique

Au delà de la nécessité de refroidir en continu les pistons, le turbo induit une nouvelle contrainte. A chaque arrêt du moteur la lubrification du turbo est interrompue, il n’est alors plus refroidi par la circulation d’huile. La température du palier côté turbine chaude voit sa température monter rapidement, dépasser les 200° c puis en quelques secondes 300° c pour atteindre un maximum vers 350° c et redescendre progressivement. L’huile présente sur les surfaces internes passe ainsi plusieurs minutes au-delà de 300° c sans être renouvelée. Il y a alors un risque de cokéfaction progressive du palier « chaud » du turbo et altération du refroidissement au démarrage puis en fonctionnement du fait de la présence de coke.

Modéliser par simulation numérique

De la 1D à la 3D, la modélisation mathématique et la simulation numérique du fonctionnement des groupes motopropulseurs F1 à l’aide d’outils informatiques sont devenues incontournables. Fluides, combustion, thermique, mécanique, systèmes aux interactions et interdépendances multiples, pas un domaine n’y échappe et en collaboration avec Renault Sport F1, nos ingénieurs disposent de puissants moyens de calculs pour simuler au niveau moléculaire le comportement des lubrifiants.

Analyser et diagnostiquer

Chaque groupe motopropulseur doit cette saison disputer cinq GP consécutifs. La fiabilité est donc primordiale. Pour assister Renault Sport F1 et ses écuries partenaires et déterminer l’état de santé de chaque moteur, Total établit sur les circuits, à chaque séance, un diagnostic de la qualité des huiles grâce à un spectromètre à étincelle qui permet de détecter la quantité de métaux présents dans les échantillons prélevés.

 Trop de fer : problème de combustion ou d’usure.
 Trop de chrome : usure de la segmentation.
 Trop de cuivre ou de plomb : coussinets de bielles en mauvais état.

Ces analyses permettent aux ingénieurs de prendre des mesures préventives ou correctives pour « sauver » les moteurs avant qu’une casse brutale ne survienne.

Chaque moteur à sa signature propre. Il convient de la comparer aux signatures des autres moteurs et de suivre surtout les anomalies sur les phénomènes d’usure. Une décision de changement de moteur, même si elle pénalise une écurie en termes de places sur la grille de départ, peut s’avérer payante si le démontage permet ensuite un diagnostic fiable de l’incident détecté. Les corrections apportées aux moteurs suivants éviteront qu’il ne se reproduise.

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