Sauber va jouer sa survie dans un avenir proche

La situation est catastrophique mais pas encore désespérée

Par Emmanuel Touzot

8 juin 2016 - 16:39
Sauber va jouer sa survie dans un (…)

Depuis la disparition de Caterham et suite au rachat in extremis de Manor, dont l’avenir a depuis été assuré au travers d’un partenariat avec Mercedes, c’est Sauber qui apparaît comme l’équipe la plus fragile et qui présente les plus gros risques de retrait. L’équipe suisse est pourtant devenue une institution de la Formule 1 après plus de vingt ans dans la discipline, mais malgré de belles saisons par le passé, elle est devenue l’ombre d’elle-même.

Suite à la parenthèse BMW, qui avait racheté la structure de Peter Sauber puis l’avait revendue à son créateur, elle a signé de belles performances mais n’a jamais réussi à franchir le cap de la victoire malgré quatre podiums en 2012, et n’a cessé depuis de reculer dans le classement. Deux ans après les podiums de Sergio Perez et Kamui Kobayashi, Sauber touchait le fond et n’inscrivait aucun point au championnat du monde des constructeurs en 2014, perdant au passage les derniers sponsors qu’il lui restait.

Momentanément revenue aux avant-postes grâce à la cinquième place de Felipe Nasr à Melbourne, début 2015, elle n’a pas réussi à garder ce niveau, faute de budget pour développer une C34 pourtant bien née. Aujourd’hui, les monoplaces aux couleurs de Banco do Brasil végètent en fond de grille, très loin des points, et l’état des lieux n’est pas brillant. Salaires non payés ou payés très en retard grâce aux sponsors de Marcus Ericsson, accrochage entre ce dernier et son équipier à Monaco, le long fleuve tranquille du milieu de peloton s’est transformé en cauchemar et Sauber ne voit plus le bout du tunnel.

Comme toute équipe qui en arrive à ces extrêmes, le problème vient tout autant de l’intérieur que de la conjoncture qui, certes, n’aide pas. Les coûts de la F1 ont augmenté de manière exponentielle ces dernières années et la F1 est un luxe que certaines équipes ne peuvent plus se payer et se contentent d’y survivre. Sauber en est l’exemple criant et a compliqué sa situation en essayant désespérément d’en sortir.

C’est début 2015 que Monisha Kaltenborn et les siens ont pris les pires décisions dans le but pourtant de pérenniser Sauber. Souhaitant poursuivre avec les maigres sponsors de Sutil et Gutierrez, la directrice avait également décidé d’engager Giedo Van der Garde, lui aussi soutenu par un puissant sponsor, avant que Nasr et Ericsson ne viennent rafler la mise et se retrouvent titulaires à la place des trois autres pilotes... pourtant sous contrat !

A vouloir bien faire et toucher le maximum d’argent, Sauber s’est pris les pieds dans le tapis, a subi un procès, perdu de l’argent et une partie de sa crédibilité avec. Cette vision à court terme a aidé à préparer la saison 2015 mais n’aura pas servi au delà de quelques courses et désormais, avec deux pilotes payants sous contrat, l’équipe d’Hinwil est tributaire de leurs envies de rester.

Si le court terme est à peine assuré, avec des salaires toujours compliqués à payer et des budgets presque impossibles à boucler, le long terme est encore plus inquiétant. Les nouveaux contrats de fourniture moteur, obligeant les constructions à plafonner le prix des blocs propulseurs, devraient donner un peu de marge, mais il se murmure aussi que Felipe Nasr et ses sponsors ont des envies d’ailleurs. Si Sauber perd son sponsor principal, ce sera un retour à la case départ et la recherche de pilotes payants, encore une fois tiraillée entre la survie assurée et la meilleure offre possible. Il ne faudrait alors pas retomber dans les travers de l’année dernière et signer des contrats à l’aveugle, mais ne pas non plus rater l’occasion d’assurer un avenir à la sympathique équipe.

Reste la piste du rachat, bien que les investisseurs ne se bousculent pas, qui pourrait être la meilleure des manières de ne pas voir Sauber disparaître. Une reprise par un constructeur pourrait fonctionner, comme Alfa Roméo qui réfléchit à un retour en Formule 1 mais qui regarde plutôt du côté de Toro Rosso. Un partenariat du type de celui de Martini avec Williams, incluant le nom du sponsor en question dans le nom de l’équipe, serait aussi une situation viable. Heineken aurait jeté son dévolu sur Force India, mais rien ne dit qu’une autre entreprise de cette envergure n’aura pas envie de tenter une entrée en Formule 1 afin de s’assurer une visibilité dans une discipline qui essaie de redorer son blason. Après tout, c’est comme ça que Red Bull avait commencé en F1 !

Quelle que soit la solution adoptée, que ça passe par un pilote amenant un budget conséquent (on pourrait penser à Pastor Maldonado, mais peu d’informations précises ont filtré sur le soutien que lui a laissé PDVSA) ou par l’arrivée d’un partenaire plus ou moins important, Sauber va devoir s’activer pour trouver une solution. Le temps presse et si rien n’est fait, il est peu probable que l’équipe survive en l’état à la saison 2017 qui verra encore les équipes dépenser des sommes astronomiques dans la recherche et le développement. C’est une question de vie ou de mort pour l’équipe qui devra espérer que ses installations ultra modernes, qui datent de l’époque BMW, pourront intéresser le constructeur qui décidera de revenir en Formule 1 ou d’éventuels investisseurs qui pourront y voir un point de départ pour reprendre l’aventure à zéro. La structure et ses employés verraient leur avenir assuré même si l’on perdrait probablement Sauber, ce ne serait qu’un moindre mal vu la situation.

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