Renault : Spa, un circuit impitoyable pour les moteurs

Le rendez-vous est le plus excitant

Par Franck Drui

21 août 2013 - 11:47
Renault : Spa, un circuit impitoyable

Spa-Francorchamps : trois sections en détail

De la Source à l’Eau Rouge

Le premier virage, La Source, est la portion la plus lente du circuit. La vitesse des voitures chute à 70 km/h et le moteur ne tourne plus qu’à 8 700 tr/min. A la sortie de l’épingle, la piste plonge vers une descente longue de plusieurs secondes. La compression qui suit exerce une énorme pression sur le V8. Proche de 5G, la charge verticale plaque tout composant « mobile » de la monoplace – carburant, lubrifiants et pilote – contre le sol. Au bout de l’ancienne ligne droite des stands, le tracé suit une pente abrupte de près de 25% ! Cette montée est équivalente aux cols les plus escarpés du Tour de France. Cet enchaînement est particulièrement délicat pour le moteur, qui subit une inversion subite de la charge. Au sommet du Raidillon, la force s’inverse à nouveau, de façon encore plus brutale… Imaginez la sensation ressentie dans votre estomac après un sommet de montagnes russes ! Les composants sont instantanément déchargés, avec une force verticale qui passe à -3G. Cela peut affecter la circulation au sein des circuits de fluides de lubrifiant et de l’essence, qui ont tendance à « s’éloigner » des pompes. Ces systèmes doivent être très efficaces pour éviter ce phénomène de déjaugeages.

La ligne droite de Kemmel

De la sortie de la Source au point de freinage pour la courbe des Combes, les moteurs sont à pleine charge et à plein régime pendant près de 23 secondes. Il s’agit d’un record au cours de la saison et cette distance exceptionnellement longue – équivalente à 20 terrains de football – place le moteur sous de très fortes contraintes. La demande est exacerbée par la montée, qui présente une dénivelée de 80 mètres entre la sortie de la Source et les Combes, et qui implique donc une modification de la pression atmosphérique. Il y a moins d’air qui entre dans le moteur au plus haut point, ce qui signifie qu’on consomme moins de carburant aux Combes que dans la compression après la Source. Cette différence est de l’ordre de 1%.

De Blanchimont à la chicane

La seconde longue ligne droite de Spa relie Stavelot à la chicane en passant par Blanchimont. Le moteur RS27 est alors à pleine charge pendant 20 secondes. A la fin de cette période, le pilote devra passer de 300 à 75 km/h pour négocier la chicane. Les ingénieurs travailleront particulièrement sur les réglages d’overrun pour garantir une bonne stabilité de la monoplace. Il s’agit de trouver un compromis pour éviter de bloquer le train arrière sans trop pousser à l’entrée du virage. En parallèle, ils essaieront de rendre les rétrogradages aussi doux que possibles pour ne pas déstabiliser l’arrière de la voiture.

Rémi Taffin, Directeur des prestations piste Renault Sport F1 :

Nous terminons la pause estivale en nous rendant sur le plus difficile des circuits. Spa-Francorchamps est une compilation de superlatifs. Il s’agit du plus long tracé de la saison – avec une météo potentiellement très variable – mais de notre point de vue ce rendez-vous est le plus excitant en raison du challenge proposé.

Pas moins de 70% des sept kilomètres sont passés à pleine charge, soit près de 5.5 kilomètres, la longueur d’un circuit standard de F1. Au cours d’un tour, le moteur fonctionne à plein régime pendant plus de 75 secondes. C’est un test impitoyable pour les mécaniques. La puissance délivrée et la vitesse de pointe sont cruciales et chaque gain sera deux fois plus efficace que sur un circuit moins exigeant tel que Monaco. Quasiment toutes nos équipes partenaires utiliseront des moteurs neufs pour cette course, afin de bénéficier d’autant de puissance que possible.

Bien que le RS27 passe plus de temps à pleine charge à Monza, c’est la combinaison des longues périodes au régime maximum, des compressions et des dénivelées qui produisent un circuit aussi exceptionnel. Trouver le bon compromis entre la fiabilité et la puissance restant l’équation de base à résoudre, nous exploitons ce tracé parmi nos références au banc d’essais. En fait, le Power Unit Energy-F1 2014 est actuellement testé suivant les caractéristiques de Spa.

Définir la bonne cartographie, qui permettra suffisamment de flexibilité en cas de météo variable, est un challenge supplémentaire. Avec une piste aussi longue, il n’est pas rare d’avoir de la pluie à un bout du circuit alors qu’il fait beau de l’autre côté. Nous essayons donc de donner autant de souplesse que possible sans compromettre la puissance et l’accélération.

Vu la masse de travail induite par ces caractéristiques – plus du double par rapport aux autres épreuves – gagner à Spa-Francorchamps est aussi gratifiant que Monza pour un motoriste.

Recherche

Info Formule 1

Photos

Vidéos