Abiteboul : La Formule 1 doit être extrême et radicale

L’avenir de la F1 en question

Par Alexandre C.

30 octobre 2016 - 13:25
Abiteboul : La Formule 1 doit être (...)

Dans une longue interview à Road & Track, Cyril Abiteboul, directeur général de Renault Sport Racing, est longuement revenu sur la situation actuelle de la Formule 1 comme de l’écurie tricolore.

Pour l’ingénieur français, la F1 n’a pas changé, mais la perception du public a pourtant évolué dans la mauvaise direction. « Nous entendons vraiment que la F1 ne serait pas aussi bonne qu’avant, donc ce doit être un peu vrai quelque part. Je pense que la course n’a pas changé. Les gens disent que c’est moins intéressant, qu’il y a moins d’excitation. Non, cela n’a pas changé. En F1, il y a toujours eu peu de dépassements, peu de manœuvres impressionnantes. Le départ, c’est là où tout arrive, ainsi que lors des deux premiers tours, et ensuite, il n’est question que de stratégie. La F1, en réalité, est restée la même ; c’est l’attente du public de la F1 qui a changé. »

Le public devient de plus en plus exigeant. Pour lui, « tout doit toujours être plus palpitant sur tous les plans, tout doit être plus spectaculaire. » L’évolution est la même, note Cyril Abiteboul, pour le skateboarding : le sport a évolué de manière « folle » en 30 ans, de même que le ski. «  Et c’est la même chose pour la F1, malheureusement. Une piste reste une piste, un départ reste un départ, un dépassement n’a pas changé. C’est, je pense, la difficulté ».

Cyril Abiteboul pense que le « défi » est de continuer à faire vivre les sports automobiles en eux-mêmes. Une menace arrive : « Un jour, nous aurons des concours de drones. Nous serons capables d’évoluer en trois dimensions, et ça soulèvera beaucoup d’enthousiasme. La grande menace aux sports automobiles, ce seront les drones. »

La F1 ne devrait-elle donc pas évoluer avec son public ? « Peut-être que nous devrons aller vers des courses plus courtes, ou avoir des éléments visuels sur les voitures pour les rendre vraiment impressionnantes. » Jenson Button avait aussi récemment évoqué l’éventualité de courses sprint en F1.

Cyril Abiteboul songe encore au jeu vidéo Wipeout. « Peut-être que ce devrait être notre vision de la F1. J’exagère, mais pas tellement. Il y a dans Wipeout plein de lumières, de couleurs, de bruits différents. Parfois, vous avez un boost, parfois c’est comme Mario Kart, et on ne veut pas aller dans cette direction. Mais nous en prenons déjà un peu le chemin. Mais selon moi, nous sommes un peu trop timides, nous ne le faisons pas de la bonne manière. »

Cyril Abiteboul pointe en particulier l’importance « absolument folle » de la gestion des pneus en F1. Il pense que « la gestion d’énergie » serait une piste davantage à développer, jusqu’à rendre « les manœuvres de dépassement fantastiques. »

« Je pense qu’il y a des choses qui sont intrinsèques au sport automobile que nous ne pouvons changer, mais il y a plein d’autres éléments que nous pouvons mettre en ordre pour répondre aux attentes d’un public habitué à des sports qui repoussent constamment leurs propres limites. »

La F1 en particulier est assez difficile à comprendre pour le grand public, ne serait-ce que du point de vue de l’ingénierie. « Parfois, la haute technologie ne se voit pas, elle est cachée dans la voiture. Je pense que nous devrions totalement revoir ces éléments et être capables d’avoir une technologie que les fans peuvent bien se représenter plutôt que de garder tout pour nous, en interne. »

Faudrait-il alors revenir en arrière ? Régresser volontairement au niveau technologique ? « Je suis pleinement d’accord avec cette option. Dans quelques années, nous serons entourés par les voitures autonomes. Toutes les voitures auront la même technologie. Donc quand nous regarderons la F1, nous voudrons avoir quelque chose de complètement différent. Pourquoi pas une technologie peu développée ? Ou bien nous devrons aller à l’autre extrême – une technologie extrêmement développée, mais encore une fois, qui est visible de l’extérieur. »

L’ingénieur tricolore pense que la meilleure solution serait celle que les constructeurs automobiles préfèrent, tout en restant soutenable du point de vue économique. Les sponsors recherchent en effet en particulier une exposition technologique et médiatique forte, ce que pourrait offrir une F1 redynamisée et avec une très haute technologie.

Mais avec une F1 qui ferait volontairement un pas en arrière, « nous aurions un modèle complètement différent, moins cher, moins dépendant des constructeurs et des partenaires techniques des sponsors. Ce serait complètement différent. Nous devons être radicaux, parce qu’actuellement, selon moi, nous sommes un peu entre deux chaises. Et nous ne pouvons nous permettre d’être dans la moyenne. Nous devons être extrêmes, de l’une ou l’autre manière. »

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