Pagenaud : La course d’endurance se vit comme une aventure
Le Français dispute les 12 Heures de Sebring ce week-end
Alors qu’il dispute ce week-end les 12 Heures de Sebring, il est revenu dans une interview sur son amour pour les courses à long format, et sur la comparaison qu’il en fait avec l’IndyCar.
Tout au long de votre carrière IndyCar, vous êtes resté toujours actif en endurance. Qu’est-ce qui rend ce type de course si spécial pour vous ?
Les courses d’endurance ont une histoire énorme. Personnellement, la première course que j’ai vue a été les 24 Heures du Mans quand j’avais cinq ans. Je me souviens de la Jaguar qui hurlait à travers les Hunaudières. Cela a éveillé mes sens à un très jeune âge. J’ai été attiré par le défi de courir dans l’obscurité, par des pluies torrentielles, ou par une journée ensoleillée. C’était fascinant de voir les pièces mécaniques chauffées à blanc briller dans la nuit, et la passion est née. Dans ma carrière aujourd’hui, l’endurance veut dire pousser mon corps et mes émotions à la limite, tout en étant privé de sommeil. Conduire à plus de 300 km/h à 3h du matin, dans l’obscurité totale, est irréel. En outre, la course d’endurance se vit comme une aventure avec une équipe autour de vous dont les membres partagent la même passion et la même émotion. Ils travailleront quel que soit la fatigue, la douleur et le froid pour gagner l’un des défis de course les plus difficiles sur terre. Ce serait comme gagner KONA en tant que triathlète ou réussir à Broadway en tant qu’acteur.
Vous avez dit que votre passage au sein de l’équipe d’endurance de Gil de Ferran a fait de vous le pilote vous êtes aujourd’hui. Quelles compétences avez-vous développées lorsque vous conduisiez pour Gil ?
En 2008, je cherchais à me frayer un chemin vers le top niveau en monoplace aux Etats-Unis alors que les deux séries étaient en plein bouleversement. Gil de Ferran a lancé une équipe d’endurance avec Acura pendant une période très intéressante pour la série LMP en ALMS. À ce moment-là, j’ai décidé que je voulais devenir le meilleur pilote d’endurance. Quand je suis arrivé dans l’équipe de Gil, ma façon de conduire était un peu « brute » et la vitesse n’était pas un problème. Cependant, quand j’ai entendu Gil s’adresser aux ingénieurs d’Acura sur la façon de régler le contrôle de traction par exemple, j’ai été époustouflé. Je pouvais ressentir beaucoup de choses en conduisant, mais c’est une toute autre histoire de transmettre cela à un ingénieur qui ne ressent pas lui-même la voiture. En plus de cela, la façon dont Gil appréhendait la course a été un enseignement capital pour moi. Je me souviens d’être assis avec lui au dîner ou sur son patio et de parler pendant des heures sur la façon d’aborder certains virages avec une voiture donnée ou de comprendre l’évolution de la piste à Indianapolis durant le mois de mai. Il m’a dit comment la température et le vent changeraient chaque jour et comment garder un état d’esprit calme tout au long du processus de réglage de la voiture en tenant compte de toutes ces variables. En d’autres termes, Gil était mon Yoda et la force était avec moi, mais je n’avais pas encore la sagesse de l’utiliser correctement.
Est-il difficile de passer d’une course IndyCar à une course d’endurance où vous avez des changements de pilotes et différents types de voitures ?
Pas vraiment. La plus grande difficulté est de s’habituer à une position de siège différente et à des douleurs musculaires variées tout au long de la course. Le plus dur est de s’adapter et de lire le trafic en endurance. En tant que troisième pilote derrière les deux pilotes principaux, votre travail est un peu différent du fait que vous ne participez pas à l’intégralité du championnat. J’ai été le pilote principal dans le passé, et à mon avis le travail du troisième pilote est de ramener la voiture en un seul morceau alors que vous ne connaissez pas la voiture aussi bien que vos coéquipiers et d’avoir un temps au tour comparable. Souvent, le troisième pilote conduit lors de relais qui ne sont pas très gratifiants, au plus chaud de la journée, lorsque la piste est grasse, et le travail est vraiment un « travail de fondation » comme je l’appelle. Vous devez rester avec le groupe de tête et prendre des risques mesurés dans le trafic. Lorsque vous sortez de la voiture, vous devez avoir mis le pilote de tête en position d’attaquer avec une voiture en bon état pour la dernière partie de la course. Bien sûr, je préfère être dans le rôle du pilote principal, mais ma priorité absolue est mon travail dans la série IndyCar. Les courses d’endurance sont la cerise sur le gâteau. J’aime aussi changer de voiture pendant la saison parce que cela vous sort de vos habitudes. Ensuite, lorsque vous revenez à votre voiture principale, votre palette de conduite s’est enrichie et votre technique s’est améliorée. Ce n’est pas un secret non plus que je veux revenir aux 24 Heures du Mans un jour pour essayer d’obtenir une victoire là-bas.
Qu’attendez-vous en particulier de ce week-end aux 12 Heures de Sebring ? À quoi les fans peuvent-ils s’attendre ?
Ce sera un week-end d’adieu aux belles voitures DPI Acura Team Penske. Pour moi, c’est une autre page qui se tourne car j’ai conduit chaque version du prototype Acura. Je connais certains des ingénieurs avec qui nous travaillons depuis 2008, et cela a été très sympa de voir leur intérêt pour ce que j’avais à dire lors des débriefings. L’équipe Penske a vraiment fait un excellent travail de mise au point pour cette voiture et elle est devenu une arme gagnante. Et bien sûr, c’est toujours un peu triste de se séparer d’une voiture que j’aime beaucoup piloter ainsi que d’une équipe avec laquelle il est si agréable de travailler. J’ai l’intention de m’imprégner de cette expérience, d’attaquer le plus possible, de m’amuser dans la voiture et avec tout le monde dans l’équipe. Il y a un peu moins de pression sur notre voiture cette année par rapport à l’année dernière où nous avons remporté le championnat, donc la tâche est facile : mode attaque complète ! C’est la meilleure approche à avoir pour un week-end de course, et j’ai hâte d’y aller.
Interview fournie par AS Sports Communication
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