Troisième pédale, stéthoscope : les astuces de McLaren F1 pour gagner
Un ancien mécanicien révèle des secrets de Woking
Dans les années 90, McLaren F1 avait impressionné par l’intelligence de ses monoplaces en ajoutant une troisième pédale dans le cockpit (voir photo en bas de l’article). Sous la direction d’Adrian Newey, les voitures de Woking avaient une commande des freins arrière indépendante comme le raconte Marc Priestley, ancien mécanicien de l’équipe.
"Il y avait toutes sortes de choses à l’époque" se souvient Priestley. "Le jeu repoussait les limites. Il y en a eu une bonne juste avant mon époque, je suis arrivé en 2000. À l’époque, vous aviez vos deux pédales, l’accélérateur et le frein, et un embrayage manuel sur le volant."
"Quelqu’un a eu l’idée d’une troisième pédale, une pédale de frein supplémentaire située dans le cockpit. Lorsque vous entriez dans un virage, elle activait les freins sur la roue arrière intérieure."
"Car lorsque vous commencez à tourner dans le virage, que vous commencez à appuyer sur l’accélérateur, il est facile pour la roue arrière intérieure de rompre la traction. Elle n’est pas chargée à ce moment-là, elle a moins d’adhérence que l’extérieure."
"Et quand vous commencez à appuyer sur l’accélérateur, il est facile pour elle de patiner, donc vous devez être un peu plus léger sur l’accélérateur. Nous avons donc eu l’idée que lorsque vous appuyiez sur cette troisième pédale, elle puisse freiner un peu la roue arrière intérieure pour l’empêcher de patiner."
"Vous pouviez alors mettre les gaz un peu plus tôt, ce qui permettait de sortir du virage plus rapidement. C’était une idée géniale, personne n’y avait pensé avant et c’était secret parce que c’était enfoui dans le cockpit, personne ne pouvait voir la troisième pédale."
Une astuce révélée par un photographe
C’est le photographe Darren Heath qui a révélé ce système. Il avait en effet remarqué les disques de freins arrière s’allumer, sans que ceux à l’avant ne brillent. Priestley confirme que c’est cette photo qui a signé la fin du dispositif.
"Jusqu’au jour où des photographes ont commencé à prendre des photos de la voiture dans un virage et où, tout à coup, quelqu’un a remarqué que le frein arrière droit, dans un virage à droite, était rouge vif."
"C’était lors de la phase d’accélération, vous ne devez même pas être sur les freins à ce moment-là et les disques brillaient rouge vif, et les gens commencent à se demander ce qui se passait. Et ces soupçons ont commencé à s’éveiller."
"Puis un jour, Mika Häkkinen est tombé en panne. Sa voiture s’est rangée sur le bord de la piste, et l’un des photographes qui avait eu tous ces soupçons est arrivé et, par curiosité, a bloqué son appareil photo à l’intérieur du cockpit après que Mika est sorti et a laissé sa voiture abandonnée, et il a pris une photo au hasard."
"Quand il l’a sorti, il a vu cette troisième pédale, il a commencé à comprendre ce qui s’était passé, a fait sauter la couverture de cette histoire, et cela a été interdit. La technologie a été interdite."
Un stéthoscope pour accélérer les arrêts aux stands
Celui qui co-présente Wheelers Dealers aujourd’hui raconte une autre trouvaille de McLaren à l’époque, qui permettait à l’équipe d’accélérer la phase de ravitaillement en essence. En effet, les équipes avaient toutes le même équipement, mais le team de Woking voulait gagner du temps.
"Je vais vous dire un super petit truc qui est top secret" poursuit Priestley. "A l’époque, les buses d’alimentation, chaque équipe avait le même kit, un kit standard, et les règles expliquaient que vous ne pouviez pas le modifier."
"Il délivrait 12 litres de carburant par seconde et lorsque vous le connectiez, à l’intérieur de cette buse géante, cette petite vanne papillon s’ouvrait en tourbillonnant, permettant au carburant de s’écouler."
"Et lorsque vous aviez versé la quantité de carburant requise, ce moteur se remettait en marche, fermait la vanne, les feux passaient finalement au vert et vous pouviez le déconnecter.
"Cela vous faisait perdre un peu de temps parce que vous attendiez et attendiez, le carburant était terminé mais vous deviez attendre que cette valve motorisée à l’intérieur de la buse, que vous ne pouviez pas voir, se ferme avant d’obtenir le feu vert pour la déconnecter."
"Un dixième de seconde" crucial
Et Priestley de raconter qu’un simple stéthoscope a permis de gagner un temps précieux : "L’un de nos collègues du bureau d’études s’est rendu compte qu’il y avait un léger retard en attendant que le moteur ferme la valve, alors qu’en fait, il n’y a pas de carburant qui coulait à ce moment-là."
"Ce qu’on a fait, c’est qu’on a pris un stéthoscope de médecin avec un bout dans l’oreille, l’autre bout dans la manche de notre combinaison avec le petit bout que le médecin met sur votre poitrine caché dans votre main pour que personne ne puisse le voir, et pendant que la buse passait, on tenait ça sur le bord de la grosse buse."
"À l’intérieur, on pouvait entendre à travers le stéthoscope le moteur qui commençait à se fermer et on l’entendait avant que les lumières ne deviennent vertes. Donc, dès que l’on commençait à entendre ce ronronnement, on pouvait déconnecter la buse. C’était un dixième de seconde, mais c’est suffisant pour vous donner un avantage."
"Personne n’a pu comprendre, et c’était légal parce que nous n’avions pas modifié la plate-forme, personne ne pouvait le voir, personne ne le savait et personne n’a pu comprendre comment nous pouvions déconnecter une fraction de seconde avant que les feux ne passent au vert. Et dans les coulisses, c’était un simple petit stéthoscope."
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