Les tops, les flops et les interrogations après le Grand Prix du Brésil
La folie pour Gasly, hara-kiri pour Ferrari
Après chaque Grand Prix, Nextgen-Auto.com vous propose de retrouver les « tops » et les « flops » identifiés par la rédaction. Qui mérite d’être louangé ? Qui, au contraire, doit être critiqué ? Enfin, quels sont les points d’interrogation ou ambiguïtés, qui devront être suivis avec intérêt lors des prochains Grands Prix ? Découvrez-le ci-dessous !
Les Tops.
Top n°1 : Gasly à la folie
Pierre Gasly a obtenu une 2e place sensationnelle à Interlagos, lors du « plus beau jour de sa vie » selon ses propres mots. Au-delà des superlatifs relatifs à une fin de course folle, ce qu’il est important de retenir, c’est que ce podium ne vient pas de nulle part, mais a été construit tout au long d’un week-end de haute volée. Dès les essais libres, Pierre Gasly avait affiché un rythme supérieur à celui de son coéquipier. En qualifications, il mettait quatre dixièmes dans la vue (en Q1) à Daniil Kvyat, éliminé dès cette première séance : sur un tracé aussi court qu’Interlagos, 4 dixièmes représentent une pleine seconde sur un circuit de longueur normale. Sacrée claque pour le Russe.
En course, Pierre Gasly avait également un rythme véritablement excellent ; le Français, sur sa Toro Rosso, était facilement le meilleur des autres, et effectuait presque une course en solitaire, protégé de l’undercut de ses poursuivants. Il a même longtemps évolué dans la même dizaine de secondes que Valtteri Bottas ou Alexander Albon. En tout état de cause, sans les incidents de fin d’épreuve, Pierre Gasly aurait certainement réussi tout de même sa meilleure course de la saison : cette 2e place, acquise grâce au prix d’une forte résistance mentale et d’une abnégation qui fait plaisir à voir, n’est par conséquent pas un coup de chance. C’est un coup de maître.
Top n°2 : La sérénité dans la domination, une course référence pour Max Verstappen
Doublé pole-victoire : Max Verstappen a sans doute réalisé le week-end parfait à Interlagos (ne manquait que le meilleur tour, revenu de peu à Valtteri Bottas). Dès les qualifications, Verstappen affichait sa maîtrise d’un tracé d’Interlagos qu’il apprécie beaucoup, en infligeant 4 dixièmes d’écart à Alexander Albon (qui avait certes l’excuse de découvrir le tracé). En rythme de course, le pilote Red Bull a relativement facilement tenu la Mercedes de Lewis Hamilton à bonne distance ; la Mercedes a certes joué au yoyo, mais la Red Bull paraissait avoir le rythme pour lui résister.
Max Verstappen a surtout impressionné par sa maîtrise de soi, son calme. Il ne nous y avait pas tellement habitués lors des précédentes courses – gageons qu’Interlagos lui montre définitivement que lorsqu’il reste calme et concentré, tout roule pour lui. Le Néerlandais a fait preuve de sérénité à quatre reprises en particulier. D’abord, à la sortie de son premier arrêt, en évitant de justesse la Williams de Robert Kubica relâchée inconsidérément par son stand. Ensuite, pour dépasser, une première fois, aux S de Senna, Lewis Hamilton qui l’avait undercuté. Verstappen a réitéré une manœuvre similaire après la première période de voiture de sécurité, à la relance, là encore sans perdre son calme, même s’il aurait pu se montrer légitimement agacé d’avoir été dépassé une deuxième fois en dehors de la piste. Enfin, lors de la dernière relance de voiture de sécurité, Max Verstappen a fait parler sa science du karting en attendant le tout dernier moment pour réaccélérer, afin d’empêcher son coéquipier Alexander Albon de prendre l’aspiration. Quand Max Verstappen fait preuve de sang-froid, il paraît invincible. Et dire que l’an dernier, ici même à Interlagos, le Néerlandais perdait ses nerfs en bousculant Esteban Ocon…
Top n°3 : Un arrêt, un podium pour Sainz !
Parti dernier, arrivé 3e : qui aurait parié sur une telle remontée de Carlos Sainz au Brésil ? Sûrement pas le principal intéressé lui-même, victime d’un problème moteur en qualifications. Comment diable Carlos Sainz s’y est-il pris pour devancer tous ses concurrents partis bien plus hauts que lui sur la grille ? Sans doute grâce à des dépassements réussis et très propres, parfois même dans un trou de souris sur Pérez aux S de Senna. Sans doute aussi grâce à la stratégie : le pilote McLaren a eu l’audace de ne s’arrêter qu’une seule fois (contre trois pour Max Verstappen), en complétant un relais formidable de 42 tours en médiums. Carlos Sainz a même réussi l’exploit, en fin d’épreuve, de résister à Kimi Räikkönen – alors que le Finlandais avait des tendres plus jeunes de 20 tours !
Sainz a également eu le privilège de ne pas chausser ces durs qui ont si peu réussi à certains pilotes, comme d’ailleurs à son coéquipier Lando Norris. Le rookie a eu l’élégance de laisser passer Carlos Sainz, sans consigne d’équipe en ce sens, quand il a réalisé qu’avec les médiums, Sainz était effectivement plus rapide. Ce podium vient ainsi récompenser les progrès de McLaren sur le plan du rythme de course, mais aussi l’osmose qui règne entre son line-up.
Les flops
Flop n°1 : Ferrari se fait hara-kiri
Chez Ferrari, on ferait bien de s’inspirer de l’entente qui règne entre Lando Norris et Carlos Sainz chez McLaren. Car évidemment, après l’accrochage fratricide entre Sebastian Vettel et Charles Leclerc à Interlagos, la situation est finalement toute inverse. Qui blâmer dans cet incident ? Aucun pilote n’est franchement tout à fait coupable ; mais Sebastian Vettel, qui était en pneus usagés, et qui a l’habitude de trop souvent accrocher au moindre duel roue contre roue, doit une fois de plus déplorer un abandon après un accrochage.
Peu importe finalement la culpabilité : l’important, c’est que cet incident laissera des traces chez Ferrari. Elle place Mattia Binotto devant un dilemme. Faut-il rétablir des consignes d’équipe, au risque de s’attirer les foudres des puristes ? Ou faut-il toujours laisser les pilotes se battre, au risque de revivre des dimanches à 0 point ? Il n’y a pas de bonne solution en réalité, et quel que soit le choix qu’il fera, Mattia Binotto sera toujours mis en difficulté sur son management. L’accrochage laissera des traces également pour l’avenir de la cohabitation entre les deux pilotes maison. Ferrari, fin 2020, osera-t-elle sacrifier Sebastian Vettel pour faire de la place à Charles Leclerc, qui lui, contrairement à son coéquipier, a une quinzaine d’années de F1 devant lui ?
Flop n°2 : Nico Hülkenberg encore absent
Pour son probable avant-dernier Grand Prix en F1, Nico Hülkenberg avait une occasion en or de signer, enfin, son premier podium dans la discipline (après 176 courses disputées). Une fois de plus, le pilote Renault a manqué l’occasion. Comme à Bakou 2017, comme à Hockenheim cette année, l’Allemand n’a pas réussi à tirer les marrons d’une feu d’une course à sensation. Il n’a pas même fini dans les points. Du reste, le méritait-il, après avoir évolué en queue de peloton pendant la majorité de l’épreuve ? Là où Daniel Ricciardo a rapporté tout de même 8 points à son équipe, Nico Hülkenberg a prouvé de nouveau sa fébrilité dans une course qui en exigeait tant (il a certes l’excuse d’avoir chaussé des durs peu performants). L’Allemand a même été pénalisé de cinq secondes pour avoir dépassé un pilote sous régime de neutralisation de la course, mais il était déjà hors des points. Quelque part, après de telles prestations, on finit par se dire que Nico Hülkenberg a une grande part de responsabilité dans ce triste record de Grands Prix disputés sans podium…
Flop n°3 : Fiabilité, stratégie : Mercedes déraille
Mercedes a pêché là où on ne l’attendait pas au Brésil : sur la fiabilité et la stratégie. Sur le plan de la fiabilité tout d’abord, l’unité de puissance de Valtteri Bottas, sa troisième de la saison (restant donc dans les quotas) a fini par rendre l’âme, en raison d’une consommation excessive d’huile. Le problème a longtemps été surveillé en course par le muret des stands, mais a fini par être incontrôlable. C’est sans doute le signe d’un moteur fatigué… comme d’ailleurs l’on pouvait le voir au niveau de la vitesse de pointe, quand Lewis Hamilton a par exemple grandement souffert face au V6 Honda de Max Verstappen ou de Pierre Gasly. Honda, qui a fait le choix de prendre bien des pénalités pour disposer de moteurs plus puissants en fin de saison, a-t-elle finalement opté pour la bonne approche ?
Quant à la stratégie, elle fut elle aussi bien défaillante pour Lewis Hamilton. Tout d’abord, le pilote Mercedes a regretté que son équipe lui ait mis des tendres pour le deuxième relais : Mercedes dévoilait ainsi ses cartes face à la concurrence. Mais surtout, le choix de faire rentrer Lewis Hamilton à deux tours de la fin a été une erreur « digne d’un rookie », une erreur « idiote » encore pour reprendre les termes de James Allison, le directeur technique. Le stratège en chef a mal calculé les conséquences de cet arrêt aux stands : il avait été promis à Lewis Hamilton qu’il ne perdrait qu’une place, quand ce fut deux. Résultat des courses, Lewis Hamilton a dû attaquer comme un damné dans l’avant-dernière boucle, pour finalement s’accrocher avec Alexander Albon. Vivement que Toto Wolff revienne !
On demande à voir…
Un Grand Prix pour sauver l’avenir d’Interlagos ?
Ce Grand Prix du Brésil fut sans doute le plus spectaculaire depuis, au moins, l’édition de 2012. Or, il intervient au moment même où l’avenir du circuit d’Interlagos est en question.
En effet, un ambitieux projet de nouveau circuit, non plus à Sao Paulo, mais à Rio de Janeiro, est en passe d’être lancé – un projet qui aurait les faveurs des autorités brésiliennes. Interlagos a certes des vieilles infrastructures, et des problèmes sécuritaires qui ont fait jaser ces dernières années, mais comme ce Grand Prix l’a prouvé, Interlagos propose aussi et surtout des courses inoubliables de temps à autres. Ce Grand Prix sauvera-t-il son avenir ? Ou faut-il dissocier la question du spectacle de la présence d’une course au calendrier ? C’est ce que l’on peut malheureusement penser : malgré une édition 2019 exceptionnelle, Hockenheim disparaîtra du calendrier ; quant au Grand Prix d’Espagne à Barcelone, souvent ponctué de processions, il a sauvé sa place in-extremis. Pour Interlagos, il faudra encore croiser les doigts…
Ferrari
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