Les tops, les flops et les interrogations après le Grand Prix d’Espagne

Leclerc et Schumacher, les bons élèves du début d’année

Par Alexandre C.

11 mai 2021 - 18:11
Les tops, les flops et les interrogation

Après chaque Grand Prix, Nextgen-Auto.com vous propose de retrouver les « tops » et les « flops » identifiés par la rédaction. Qui mérite d’être applaudi ? Qui, au contraire, doit être critiqué ? Enfin, quels sont les points d’interrogation ou ambiguïtés, qui devront être suivis avec intérêt lors des prochains Grands Prix ? Découvrez-le ci-dessous !

Les Tops.

Top n°1 : Un duel Hamilton/Verstappen qui rend même intéressant un Grand Prix d’Espagne !

Lewis Hamilton, Max Verstappen, Valtteri Bottas. L’observateur extérieur qui découvrirait le podium de ce Grand Prix d’Espagne aurait quelques raisons de hausser les épaules : n’est-ce pas là le podium traditionnel de la F1, le plus vu d’ailleurs de l’histoire ? Et pourtant : ce Grand Prix d’Espagne, d’ordinaire roboratif étant donné la difficulté des dépassements en Catalogne, a été sans doute le plus intéressant depuis 2016 et le double accrochage des Mercedes. La raison ? La bataille stratégie intense, et dénouée seulement dans les derniers tours, qui a opposé l’équipe de Milton Keynes à celle de Brackley et Brixworth. La prise de risque stratégique de Mercedes, effectuant un arrêt supplémentaire afin d’avoir le delta nécessaire pour dépasser une Red Bull rapide en lignes droites, avait tout de quoi rappeler le Hungaroring 2019 : même Red Bull en tête, même circuit où il est difficile de dépasser sans un delta significatif, même maestria stratégique de Mercedes et de Lewis Hamilton, qui ont effectué avec brio une stratégie pourtant risquée.

C’est le propre de cette saison, si serrée entre Mercedes et Red Bull, ou plutôt entre Lewis Hamilton et Max Verstappen, de rendre intéressants même les Grands Prix sur le papier potentiellement ennuyeux. Ce faible écart, c’est celui des qualifications, avec 36 millièmes seulement entre les deux hommes. C’est celui en course, avec un mano-a-mano qui a duré 60 tours (sur 66) avant que la Mercedes ne s’envole. C’est ce suspense stratégique qui, même sans dépassements en piste, a pu rendre beaucoup plus intéressant que prévu ce Grand Prix d’Espagne. Voici pourquoi on aime cette saison 2021 : elle a de quoi, avec cette hiérarchie si serrée devant, rendre chaque Grand Prix attractif. Même celui de Monaco ?

Top n°2 : Charles Leclerc rend une copie parfaite

En 2019, Charles Leclerc était abonné aux premières positions en qualifications (7 poles), en 2021, c’est plutôt à la 4e place qu’il finit régulièrement. Dans les deux cas, le Monégasque maximise le potentiel de sa Ferrari.

Facilement devant son coéquipier Carlos Sainz en qualifications, Charles Leclerc a réparé le petit affront de Portimao où il avait été battu dans cet exercice du tour rapide, pour finir à la meilleure place possible (et peut-être davantage car la Red Bull de Sergio Pérez aurait dû finir devant lui). En course, le vainqueur de Monza 2019 allait rendre de nouveau une copie parfaite. C’est bien simple, on voit mal ce qu’il aurait pu faire de mieux. Au départ, il a superbement dépassé un Valtteri Bottas inerte à l’extérieur dans le virage 3 : un petit camouflet pour la Mercedes. Bien aidé il est vrai par la nature du tracé de Barcelone, Charles Leclerc a ensuite tenu en respect pendant 28 tours la Mercedes du Finlandais, jusqu’à son premier arrêt. Qu’il perde la 3e place n’est en rien une déception : c’est plutôt le fait qu’il ait occupé si longtemps une place sur le podium qui est formidable. Le pilote Ferrari a ainsi gagné le droit de finir tranquillement « meilleur des autres ». Voire meilleur tout court de ce Grand Prix ?

Top n°3 : Mick Schumacher, le patient allemand

D’ordinaire, Mick Schumacher avait l’habitude d’apprendre (voire de décevoir) la première saison en formule de promotion (comme en F3 ou en F2) avant de monter en puissance la seconde année. Cette fois-ci, il semble être dans le match dès ses premiers coups de volant dans la discipline. De nouveau à Barcelone, comme à Portimao, l’Allemand a surperformé par rapport au si faible potentiel de sa Haas. En qualifications, il a de nouveau mis la pâtée à Nikita Mazepin, avec un écart supérieur à 6 dixièmes, ce qui tient du gouffre sur le plutôt court tracé de Barcelone. Au départ, Mick Schumacher a ensuite sauté sur les deux Williams, en jouant avec elles pendant le premier tiers de la course – il s’inclinera faute de pouvoir tenir ses tendres sur une Haas trop instable pour cela. Retenons l’écart séparant les deux Haas à l’arrivée, sur une stratégie similaire : près de 50 secondes ! Avec un 12e meilleur temps en course (1,5 seconde plus rapide que Nikita Mazepin), Mick Schumacher a aussi montré qu’il avait du potentiel en gestion de gommes. Le rythme est ainsi très, très positif ; son attitude aussi : aucune gêne constatée sur les drapeaux bleus ; et des remerciements constants à ses ingénieurs, notamment pour avoir trouvé des réglages plus « agressifs » en qualifications. Une copie très propre, de nouveau, qu’un mauvais placement lors d’un arrêt au stand ne gâche aucunement.

Les flops

Flop n°1 : Sergio Pérez et Valtteri Bottas, seconds couteaux inutiles stratégiquement

A quoi servent Sergio Pérez et Valtteri Bottas ? La question peut sembler saugrenue voire brutale, mais elle mérite d’être posée après ce Grand Prix d’Espagne, tant les deux coéquipiers de Lewis Hamilton et de Max Verstappen ont été, sinon totalement inutiles, au moins transparents ce week-end. C’est bien simple, l’utilité des pilotes numéros 2 n’est pas seulement de ramener des points intermédiaires : c’est aussi de pouvoir aider les jeux stratégiques de leurs chefs de file.

Or ni Sergio Pérez ni Valtteri Bottas n’ont pu jouer ce rôle à Barcelone en raison d’un rythme déficient. On peut accorder à Bottas que la menace du Finlandais a peut-être potentiellement mis assez de pression à Red Bull pour ne pas riposter au deuxième arrêt de Hamilton. Mais le manque de performance est indéniable.

Ils ont certes des excuses : blessure à l’épaule en qualifications et adaptation à la Red Bull pour Sergio Pérez, mauvais départ pour Valtteri Bottas rapidement dépassé par Charles Leclerc… Cependant une fois encore, Lewis Hamilton et Max Verstappen semblaient seul au monde ce week-end.

On peut même dire que le meilleur adjuvant de Max Verstappen en course ne fut pas son coéquipier Sergio Pérez, empêtré dans le peloton, mais… Charles Leclerc, qui a longtemps retenu Valtteri Bottas derrière lui. Pire, Valtteri Bottas a même fait perdre une demi-seconde à Lewis Hamilton en le retenant trop longtemps alors que le Britannique revenait sur lui. En grand manque de confiance, les pilotes numéros 2 n’abordent pas si sereinement que cela Monaco…

Flop n°2 : L’entêtement stratégique d’Alpine F1

Les qualifications semblaient prometteuses pour Alpine, surtout pour Esteban Ocon après un formidable 5e temps. Et pourtant le dimanche fut très décevant avec deux unités marquées. Quels coupables blâmer ? Sans doute le rythme de course des Bleus, un peu plus décevant qu’espéré. Mais aussi l’entêtement stratégique de l’équipe. Tenter le pari d’une stratégie à un seul arrêt était pourquoi pas envisageable : mais pourquoi l’avoir essayé sur les deux monoplaces et non une ? Pourquoi ne pas avoir panaché les stratégies ? Et pourquoi ne pas avoir changé d’avis au milieu de la course, alors qu’il apparaissait (la remontée de George Russell en témoignait avec un premier arrêt précoce, celle de Lando Norris plus tard dans la course démontrerait la même chose) que la stratégie à deux arrêts aux stands était clairement gagnante ce dimanche à Barcelone (Max Verstappen et Lewis Hamilton ne diront pas le contraire) ?

Certainement, les relais en médiums de 40 et 42 tours d’Ocon et de Fernando Alonso étaient beaucoup trop longs pour être compétitifs en fin de Grand Prix : en témoignent l’écart si faible entre Pierre Gasly et Esteban Ocon à l’arrivée (1 dixième) et l’effondrement de Fernando Alonso en fin d’épreuve. Ainsi que le maigre 18e meilleur temps d’Ocon en course, qui n’avait donc plus trop de potentiel dans ses Pirelli.

Esteban Ocon en avait conscience : à la radio à la fin de la course, le Normand disait son envie de « discuter plus tard » de la stratégie. Il a sûrement bien fait de ne pas laver son linge sale en public car on se doute que le débriefing ne devait pas être charmant… Le rythme d’Alpine est en progression depuis deux Grands Prix, il faut maintenant que la stratégie suive !

Flop n°3 : Yuki Tsunoda doit se recentrer sur lui-même

En tout début d’année, la propension de Yuki Tsunoda à accumuler les jurons au volant, à sortir des tours rapides et des manœuvres osées, à ne pas rentrer son DRS à l’attaque aux essais hivernaux de Bahreïn, lui donnaient un côté aussi impétueux que sympathique. Après quelques courses, le « dark side » de ce caractère ressurgit : Yuki Tsunoda apparaît comme un homme trop pressé et émotif, à l’heure où Mick Schumacher construit son apprentissage patiemment. L’impétuosité du Japonais se traduit, sur le circuit, par des franchissements des limites de la piste ou un crash en Q1 (lors des derniers Grands Prix) ; pressé de se canaliser, Yuki Tsunoda a alors subitement perdu en rythme, comme le montre son élimination en Q1 à Barcelone. Ce sont enfin et surtout ses commentaires, là encore trop émotifs, qui ont inquiété : après le samedi, Yuki Tsunoda s’est demandé s’il avait la « même voiture que Pierre Gasly ». Oui, bien sûr ! Mais sans doute pas le même pilotage puisque Pierre Gasly, lui, n’a pas mis les deux roues dans le gravier en Q1… Une faute de communication, surtout dans une famille Red Bull si sensible avec un Franz Tost revêche et un Helmut Marko rancunier !

Désormais Yuki Tsunoda sait ce qu’il doit faire : arrêter de jurer, de parler, de réagir à chaud, et se concentrer sur lui-même et sur ses progrès.

On demande à voir…

McLaren versus Ferrari, le duel vintage pour la 3e place

Après 4 courses, 5 points seulement séparent McLaren de Ferrari au classement des constructeurs. Certes, il s’agit d’un duel pour la 3e place, mais tout de même, chacun sera ravi de revoir le regain de forme des deux équipes historiques de la F1 de ces dernières décennies. D’ores et déjà, le trou creusé entre Ferrari et Alpine (45 points au classement des constructeurs) laisse augurer d’une bataille à deux pour cette 3e place. Qui aura alors l’avantage ? Les monoplaces orange, avec une MCL35M très bien née et pouvant compter sur deux pilotes maximisant chaque opportunité en course ? Ou Ferrari, avec une monoplace qui peut s’appuyer tant sur les performances constantes et remarquables de Charles Leclerc, que sur des finances et donc un rythme de développement plus soutenu ? Après le Grand Prix d’Espagne, Lando Norris confiait en tout cas son inquiétude comme sa surprise de voir Ferrari tant sous-estimée (c’est peut-être le résultat de la saison dernière) : « Je ne sais pas pourquoi les gens les sous-estiment autant. C’est une des monoplaces les plus rapides depuis le début de saison. Nous aurions pu les égaler sur le rythme de qualification hier, mais puisque nous comptions sur l’arrière de la voiture, nous aurions eu du mal. »

Le duel se poursuivra, toujours incertain, à Monaco, avec peut-être un avantage Ferrari – car en Principauté, le léger déficit de la Scuderia en vitesse de pointe qui subsiste encore sera forcément moins visible.

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