Le retour du gravier : comment la FIA a réglé le fiasco des limites de piste en Autriche

Test grandeur nature ce week-end

Par Alexandre Combralier

27 juin 2024 - 14:00
Le retour du gravier : comment la (…)

L’an dernier, le Grand Prix d’Autriche avait été nettement pollué par le problème des limites de piste. Les innombrables annulations de tour (plus de 1000 infractions !) et pénalités avaient retardé après la course le verdict final des résultats ; et ce chaos réglementaire avait donc brouillé la compréhension des résultats non seulement pour le grand public, mais même pour les pilotes de F1.

La FIA assure avoir trouvé des solutions simples et efficaces pour résoudre, cette année, ce fiasco – mais quelles sont-elles ?

Comme nous vous le rapportions,une intelligence artificielle sera d’abord déployée pour aider à repérer les infractions, à l’aide d’une ligne bleue. Cette ligne apparait au milieu des deux lignes blanches à l’extérieur de la piste, entre le bord de piste et le vibreur, pour signaler les infractions de manière ostentatoire.

Niels Wittich, le directeur de course de la FIA, est confiant avant ce week-end au Red Bull Ring : les leçons du fiasco de l’an dernier ont été bien tirées.

Wittich a livré tous les détails de ces solutions dans une interview donnée pour, justement, le site officiel de la Fédération.

Q : Simplement, quels changements ont été apportés au Red Bull Ring pour l’événement de cette année ?

Tout d’abord, nous avons installé une zone de graviers de 2,5 mètres de large directement derrière le vibreur à la sortie des virages 9 et 10 sur le côté gauche. Dans les virages 1, 3, 4 et 6, nous avons déplacé la ligne blanche pour que la distance avec le gravier soit inférieure à 2 mètres.

Q : Pourquoi ces changements ?

Il est évident que le contrôle des limites de piste en Autriche a été problématique l’année dernière, car de nombreux pilotes ont décidé d’aller un peu plus loin à la sortie des virages 9 et 10. Ce n’est pas surprenant car l’asphalte, derrière les vibreurs, leur permettait de placer une roue à cet endroit. Et comme le niveau d’adhérence était presque le même que sur la piste, ils ont profité de l’occasion pour le faire.

Au fil des ans, les ingénieurs ont constaté qu’en termes de temps au tour, il était plutôt avantageux de rouler un peu plus au large, alors à un moment donné, cela nous conduit à dire : "OK, mais il y a des règlements, vous devez rouler entre les lignes blanches".

Il y a eu un grand nombre d’infractions l’année dernière et beaucoup de pénalités après la course. C’est pourquoi, cette année, nous créons une dissuasion naturelle avec l’installation d’une zone de graviers. Et nous clarifions la façon dont nous délimitons les limites de la piste.

Q : Qu’est-ce que cela signifie pour les virages 9 et 10 pour les pilotes ?

Ils sauront où se trouve la limite. C’est ce qu’ils veulent et ce qu’ils ont demandé. Ils auront un retour d’information, ils le sentiront lorsqu’ils s’approcheront des graviers, et s’ils mettent une roue dans les graviers, cela les pénalisera parce que la voiture sera plus lente.

C’est un moyen de dissuasion naturel et c’est la première demande des pilotes. Il n’y a plus de tentation d’explorer les limites parce qu’il n’y a plus de gain possible. S’il n’y a que de l’asphalte ou une ligne blanche, les pilotes et les équipes iront toujours jusqu’au dernier millimètre parce qu’ils le peuvent. Mais quand on roule sur le gravier, il est impossible d’être plus rapide.

Q : Cette solution sera-t-elle mis en œuvre sur d’autres circuits ?

Shanghai est le circuit le plus récent où nous l’avons fait [dans les virages 10, 12 et 17] et les réactions des pilotes ont été très positives.

Q : Ces modifications ont-elles été faciles à mettre en place sur le Red Bull Ring ?

Le "problème" que nous avons rencontré est que la largeur du vibreur est de deux mètres. On manquait donc de temps pour dire : "OK, nous allons enlever la deuxième bordure et mettre le gravier juste derrière". Ce serait la configuration parfaite, similaire à celle que nous avions en Chine, d’opter pour un vibreur d’un mètre et du gravier ensuite, parce qu’une voiture de Formule 1 de deux mètres de large, c’est de l’histoire ancienne avec les limites de la piste.

Nous avons donc une solution légèrement différente en Autriche, qui consiste à raccourcir artificiellement la largeur du vibreur en déplaçant la ligne blanche sur le vibreur, car la première partie de la bordure est presque plate. Ce que vous verrez, c’est que la ligne blanche sur le vibreur a été déplacée et qu’il y a maintenant une ligne bleu clair derrière, juste pour faciliter la tâche des commissaires, celle des gars du Centre des opérations à distance (ROC) et de nous, à la Direction de course. Cela nous sera plus facile d’identifier quand un pilote dépasse la limite, parce qu’il y a alors la ligne blanche, la ligne bleu clair, le pneu noir - il y a une différence visuelle évidente.

Q : Ces changements auront-ils une incidence concernant les pénalités pour dépassement des limites de piste ?

Le jugement sur les limites de la piste reste le même. Une fois qu’il n’y a plus aucune partie de la voiture sur la ligne blanche, c’est fini. Ces changements nous aideront pour prendre toute décision. Dans le passé, il s’agissait d’une ligne blanche peinte sur un vibreur blanc. Il n’était donc pas possible de dire à 100 % : "OK, nous pensons que le pneu était hors des limites de piste, oui, mais nous ne pouvons pas le prouver parce qu’il s’agit d’une ligne blanche et d’un vibreur blanc". Maintenant, vous verrez des pneus noirs sur le bleu clair. Plus rien n’est en contact avec la ligne blanche. Le travail est fait. Le pilote est clairement hors-piste.

Q : La zone de graviers a été utilisée au Grand Prix de Chine et en Autriche. Et bientôt sur d’autres circuits ?

On espère maintenant que cela pourra être appliqué partout où c’est nécessaire. Le gravier n’est pas cher et c’est une solution facile pour la plupart des circuits. Par exemple, je pense qu’un mois environ après le Grand Prix d’Autriche de Formule 1, le MotoGP sera au Red Bull Ring. Comme ils n’aiment pas la transition entre le vibreur, la bande de gravier et une surface normale de nouveau, ils remettront de l’asphalte et enlèveront le gravier pour le stocker. L’année prochaine, il suffira d’enlever l’asphalte et de remettre du gravier. Dans l’idéal, ils enlèveraient la deuxième bordure et mettraient le gravier à proximité.

Q : Qu’a-t-on fait dans le virage 4 ?

La bordure a été rétrécie en déplaçant la ligne blanche, de sorte que la distance jusqu’au gravier est maintenant de 1,8 mètre. C’est juste pour s’assurer que même en F3, par exemple, s’ils mettent une roue dans le gravier, il n’y ait pas de problème avec les limites de la piste. Nous avons également déplacé les lignes blanches dans les virages 1, 3 et 6 pour créer la même distance de 1,8 mètre par rapport au gravier.

Par conséquent, si un pilote se contente d’utiliser la trajectoire de course normale, il risque de dépasser les limites de la piste. C’est pourquoi, en Espagne, nous avons triplé la largeur de la ligne blanche afin d’éliminer ce problème de limite de piste. Mais c’est la dernière spécification créée par la FIA pour aider les circuits à accueillir à la fois les motos et les voitures et pour satisfaire tout le monde.

Q : Des changements de ce type sont-ils prévus ailleurs ?

Il y a des circuits qui sont plus affectés que d’autres par les limites de piste et il y en a d’autres qui n’ont pas besoin d’être modifiés. À Zandvoort, par exemple, les limites de la piste sont naturelles. Mais il y a d’autres circuits, comme celui d’Austin, où nous aimerions mettre en œuvre ceci ou quelque chose de similaire, créant ainsi une dissuasion naturelle. Par exemple, à Austin, à la sortie du virage 19, il y a une très large sortie de piste et à la sortie du virage 12, il y a un très large bord de piste aussi en asphalte.

Nous examinons chaque circuit pour voir où des améliorations peuvent être apportées. C’est un processus permanent.

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