Les F1 vont-elles toutes ressembler à la Red Bull l’an prochain ?

Le règlement pourrait aussi réserver des surprises

Par Alexandre C.

25 novembre 2022 - 17:52
Les F1 vont-elles toutes ressembler à la

La saison 2022 était celle d’un tout nouveau règlement aérodynamique, qui a semblé donner satisfaction dans ses buts premiers (permettre aux voitures de se suivre de plus près, en réduisant la perte d’appui quand une voiture chasse une autre).

Le bilan doit donc être apprécié au vu de ces objectifs, et non du suspense en haut de tableau, avec la franche domination de la Red Bull de Max Verstappen en deuxième moitié de saison.

Tom McCullough, l’ingénieur responsable de la performance chez Aston Martin F1, est un des mieux placés pour faire le bilan. Alors ? Verdict ? En tant que passionné, et en tant qu’ingénieur, ce bilan a-t-il pu convaincre, ou non, l’ingénieur de Silverstone ?

« Oui, évidemment, la FIA a établi un ensemble de règlements avec certains objectifs. Notre travail, en tant qu’ingénieurs, est de comprendre ces règlements et d’essayer de faire une voiture aussi rapide que possible. Les voitures peuvent évidemment suivre de plus près. Les possibilités de réussir des dépassements dépendent aussi des pneus et de leur dégradation et évidemment des différents circuits. »

« Les problèmes que nous avons rencontrés au début de l’année - et je pense que c’était le cas de la plupart des équipes à un certain niveau - avec le marsouinage, n’étaient pas idéaux. Mais la FIA a cherché à résoudre ce problème avec un changement de règlement et nous avons eu ces mesures d’oscillation métrique qu’ils ont introduites cette année. »

« C’était un défi du point de vue de l’ingénierie, c’était en fait fascinant, je pense que vous apprenez plus avec un grand changement de règlement, surtout quand vous n’êtes pas aussi fort que vous voulez l’être, vous apprenez encore plus. Mais Red Bull, ils ont montré au cours de la saison, comment il fallait faire. Et c’est une référence pour nous – pour suivre le travail que Red Bull a fait. »

Flatté par son homologue d’Aston Martin F1, Paul Monaghan, du côté de Red Bull, commence par évoquer un paradoxe : ce règlement aérodynamique était censé être très restrictif, et pourtant, les monoplaces en début d’année présentaient des solutions parfois radicalement différentes, sur les suspensions ou les pontons notamment.

« Je ne voudrais pas dire que ces règlements sont bons, mauvais ou indifférents. Personnellement, je pense que ces réglementations sont un peu contraignantes dans la mesure où les voitures sont assez semblables - et où nos libertés sont restreintes, par rapport aux années précédentes, peut-être. »

« Si le but était d’amener les voitures à se rapprocher un peu plus les unes des autres, cela semble avoir été atteint. De notre côté, nous avons peut-être eu la chance d’avoir une courbe très prometteuse en matière de développement tôt dans la saison, et d’en tirer les bénéfices. Donc, en termes d’exploitation des règlements, nous semblons être... toutes les équipes semblent être capables de le faire. Le marsouinage, en raison de l’effet de sol, a heurté tout le monde à plus ou moins grande échelle, cela dépendant aussi du circuit. »

« La FIA, comme on l’a noté, a mis en place certaines interprétations de la réglementation pour résoudre le problème du marsouinage, ce qui a affecté tout le monde Je pense qu’il y aurait eu une convergence naturelle pour l’éliminer, elle a peut-être été accélérée. Et c’est là que nous nous trouvons au final, n’est-ce pas ? Il y a quelques changements mineurs pour l’année prochaine, que tout le monde devra apprendre et adapter, et essayer d’exploiter et c’est parti. »

Directeur technique de Williams, François-Xavier Demaison n’a pas supervisé en amont tout le projet du développement de la voiture actuelle. Il parle plus du dialogue constant avec la FIA cette année pour évoquer les points forts ou faibles du règlement.

« Je suis un peu nouveau dans ce sport, donc dire que le résultat est atteint, je ne sais pas. Je ne suis pas vraiment la bonne personne pour répondre à cette question. Nous sommes heureux de discuter avec la FIA et de continuer à pousser et à aller dans cette direction. Si le public n’est pas assez heureux, la FIA devrait revenir vers nous - et nous pouvons essayer de faire de meilleures règles et de rendre le sport plus attrayant pour les gens, si c’est la priorité numéro un. »

« Un ingénieur essaiera toujours d’utiliser les règles autant qu’il le peut pour rendre sa voiture plus rapide. Mais la FIA doit ensuite s’assurer que nous allions dans la bonne direction en termes de spectacle. Mais ce n’est pas la responsabilité du directeur technique normalement. »

Les F1 vont-elles finir par toutes se ressembler ?

La question de la liberté de développement continuera cependant à se poser pour les prochaines années.

Le directeur technique de Williams pense-t-il ainsi que toutes les voitures vont finir par se ressembler ? On a déjà vu Aston Martin F1 s’inspirer largement de Milton Keynes…

« Eh bien, quand on voit la vitesse de la voiture bleue, je suis sûr... Je veux dire, on a déjà vu beaucoup de voitures essayer d’aller dans cette direction. Donc je serai surpris si de plus en plus de voitures ne vont pas dans la même direction. Vous ne pouvez pas l’éviter. C’est le sport automobile. On copie toujours la voiture la plus rapide. C’est la Formule 1. »

Pourtant, Paul Monaghan contredit Demaison : le copier/coller peut aussi apporter quelques mauvaises surprises selon l’ADN des voitures ! D’autant plus que le règlement va aussi évoluer l’an prochain (un peu, avec les bords du plancher qui seront rehaussés notamment).

« Pour faire simple, non. Je ne pense pas que les voitures auront une apparence identique. Je ne pense pas que nous en soyons encore là. Le règlement est plus restrictif, sur la forme de la voiture, qu’auparavant. Mais il y a des différences, en particulier si vous regardez la Mercedes, la Ferrari et la Red Bull. Il y a quelques différences significatives. »

« Il y a des changements de règlementation pour l’année prochaine, allons-nous avoir tous la même solution lors de la première course ? J’en doute. Cela ne semble pas être la voie de notre sport. Je pense donc qu’il y aura des différences. Elles seront de moindre ampleur que celles que nous avons vues, disons, de 2010 à 2012 et ainsi de suite. C’est l’évolution du sport et c’est ainsi. »

Le développement entre les saisons et intra-saison, conclut Tom McCullough, chez Aston Martin F1, sera aussi affecté par les répercussions des budgets plafonnés, qui continuent de produire leurs effets d’année en année.

« Le plafonnement des coûts a été un élément intéressant cette année. Je sais que dans notre équipe, et je suis sûr que beaucoup d’autres équipes aussi, nous n’avons pas été en mesure de mettre à jour, développer, changer la voiture autant que nous l’avons fait dans le passé. Quand je regarde le modèle en soufflerie de notre propre voiture, il est assez différent de ce que nous avons maintenant. Dans les années passées, vous auriez apporté plus encore de pièces de la soufflerie à la piste. »

« Donc je pense que les autres équipes seront dans une situation similaire. Le plafonnement des coûts signifie que les gens ont travaillé sur des idées qu’ils n’ont pas été en mesure d’apporter sur la piste et que les autres n’ont pas vu, et donc il y aura encore quelques différences au début de l’année prochaine. »

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