Hannah Schmitz a senti ‘une certaine résistance’ en tant que femme

La cheffe stratège de Red Bull raconte son parcours

Par Alexandre C.

15 avril 2023 - 15:46
Hannah Schmitz a senti ‘une certaine (…)

Hannah Schmitz est une des plus célèbres figures du muret des stands de F1 : c’est en effet elle qui décide des stratégies du côté de Red Bull Racing. Avec un grand succès ces dernières années.

Bien évidemment, Hannah Schmitz est une figure de proue des femmes en F1 – avec Rosie Wait et Ruth Bescombe (diplômées de Cambridge), cheffes stratégistes chez Mercedes et Alfa Romeo respectivement.

Mais c’est bien Schmitz qui a ainsi reçu récemment le trophée ‘Ingénieure de l’année’, décerné par McLaren Applied Technology, pour venir récompenser les récents succès de Red Bull.

Qui est Hannah Schmitz ? L’ingénieure d’origine allemande, ancienne grande fan de Michael Schumacher, a-t-elle eu un chemin facile vers la F1 ?

Tout a en fait commencé « très tôt » raconte l’ancienne stagiaire de Red Bull.

Son parcours est intéressant en tant qu’il peut servir de ‘modèle’ aux femmes désirant accéder à la F1. D’autant plus que Schmitz a grandi dans un univers bien éloigné du sport auto.

« Mes parents ont remarqué que je jouais avec des voitures et des Lego, et non avec des poupées. Je m’intéressais davantage au fonctionnement des objets et à leur assemblage. Personne dans ma famille ne regardait les courses automobiles, mais je m’y suis intéressée et mon père aimait regarder n’importe quel sport. »

« J’adorais les mathématiques et la physique à l’école et j’avais une enseignante très inspirante. Elle nous enseignait l’application de la physique dans le monde réel et c’est ce qui m’a amené à m’intéresser aux voitures. Je savais que je voulais faire de l’ingénierie dans le domaine de l’automobile, le summum étant évidemment la F1. C’est à l’université que j’ai commencé à envisager une carrière dans ce domaine. »

« L’année où j’ai obtenu mon diplôme, j’ai été parrainée à Londres par une entreprise de services de construction, où j’étais censée aller, mais il y a eu le grand krach économique et personne n’embauchait ».

« Red Bull proposait un programme de placement d’étudiants à Milton Keynes et mon superviseur pour mon projet de fin d’études, qui consistait à fabriquer la suspension d’une voiture à énergie solaire, a pensé que c’était quelque chose qui m’intéresserait vraiment. J’ai posé ma candidature avant d’obtenir mon diplôme et, heureusement, trois mois après mon stage, quelqu’un a démissionné et un poste à temps plein s’est libéré. Dès que j’ai commencé, j’ai su que c’était ce que je voulais faire. »

Être mère et ingénieur en cheffe en F1 : impossible ?

Schmitz a connu deux maternités en 2019 et 2021 : et comme elle le décrit, il a fallu concilier ainsi vie familiale et professionnelle, en se creusant les méninges...

Présente à l’usine à Milton Keynes comme sur le muret des stands en Grands Prix, Schmitz avait-elle encore du temps pour sa vie familiale ?

« J’ai vécu à Milton Keynes pendant un certain temps, puis j’ai fini par aller à Londres pour ce genre de vie. Lorsque j’étais enceinte de mon premier enfant, nous avons décidé de nous rapprocher de nos familles, car je suis très souvent en déplacement. Je fais une heure et demie de route aller-retour lorsque je suis au bureau, mais j’habite près d’Heathrow. »

« Mon mari et moi trouvons que la société n’est pas très bien conçue pour que les deux parents travaillent. Nous avons certainement trouvé cela difficile, mais nous travaillons ensemble et tout est 50/50, ce n’est pas toujours la responsabilité d’une seule personne. Cela nous aide vraiment à gérer la situation en tant que famille. Nous avons tous les deux pris un congé parental de six mois et nous comprenons tous les deux ce que c’est que d’être parent à la maison et au travail. »

« Il doit faire beaucoup de choses par lui-même lorsque je suis à l’étranger, mais c’est pour cela que nous vivons près de nos familles. Nous avons ce soutien. C’est difficile, mais j’ai l’impression de faire quelque chose que mes enfants peuvent regarder à la télévision et qui les intéresse vraiment. »

« Récemment, à l’école, c’était la journée "Déguise-toi comme tu veux être quand tu seras grand" et ma fille a choisi d’être un ingénieur de course portant un petit T-shirt Red Bull. Je me suis dit : Ahh.... Cela en vaut la peine. »

« Mon mari travaille à la City et a lui aussi un emploi à haute pression et à horaires décalés, mais il n’est pas obligé de travailler le week-end et il a de la flexibilité. Nous voulions tous les deux fonder une famille et poursuivre notre carrière, c’est pourquoi nous travaillons dur. Certaines semaines, cela fonctionne bien et d’autres semaines, cela semble impossible ! »

Et donc, malgré cette double maternité, Schmitz explique pourquoi elle a tenu à continuer à se rendre sur les Grands Prix.

« Je préfère le muret des stands en Grand Prix pour le contrôle et l’adrénaline, mais ce qui fait notre force en tant qu’équipe, c’est la rotation entre Will [autre responsable de la stratégie] et moi. Car dans la salle des opérations, il y a toujours quelqu’un qui sait ce que c’est que d’être la personne au bord de la piste, qui s’assure que toutes les informations transmises soient exactement ce qu’ils veulent entendre. »

« Le soutien que nous avons entre nous est vraiment puissant. Et puis le fait de passer un peu de temps à la campagne aide à lutter contre la fatigue, donc ça marche bien. »

Vaincre les préjugés : méthode

En tant que femme en F1, Schmitz n’a-t-elle pas dû faire face à certains préjugés ou stéréotypes négatifs ?

« Oui, et avec la stratégie, vous prenez des décisions, vous faites des choix et vous dites aux gens ce qu’ils doivent faire. Il faut donc établir la confiance quel que soit le genre, mais je pense que c’était peut-être plus difficile parce qu’une femme ne l’avait jamais fait auparavant. »

« Au début, j’ai senti une certaine résistance et je me suis dit : Est-ce que tu vas pouvoir le faire ? As-tu vraiment confiance en toi ? Et est-ce que les gens vont t’écouter ? »

« Mais il n’a pas fallu longtemps pour que ce soit le cas. La formation prend du temps, mais j’étais qualifiée et depuis que je fais ce travail, je n’ai jamais eu de problème. »

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