Les nouvelles qualifications : changements et conséquences

La théorie pourrait ne pas coller à la réalité

Par Emmanuel Touzot

28 février 2016 - 11:15
Les nouvelles qualifications : (…)

La Formule 1 devrait voir son format de qualifications changer en cours de saison. Elle obéit malheureusement à la règle tacite selon laquelle chaque changement de règlement complique encore la vie des observateurs. La grille sera donc formée après une séance qui sera divisée en trois parties, chacune voyant l’élimination du pilote le moins bien classé toutes les 90 secondes.

La Q1 et la Q2 verront sept pilotes éliminés alors que la Q3 verra les deux derniers pilotes en lice se battre pour la pole lors des 90 dernières secondes. Ce qui ne devrait pas empêcher Mercedes de dominer les séances chronométrées.

Des pièges faciles à éviter

N’ayant raté que deux fois la pole position lors des 38 dernières courses, la firme à l’étoile sera encore la référence cette saison, et les sept minutes dont disposeront les pilotes en début de Q1 avant que les éliminations ne commencent devraient largement suffire à Hamilton et Rosberg pour passer à la phase suivante.

Le vrai piège réside dans le fait de rouler tous ensemble, puisqu’il y aura 22 pilotes en course cette année, et n’avoir que sept minutes pour se mettre à l’abri. Mais qui pense vraiment que Mercedes tombera dans le piège ?

"Je pense que si nous avions des grilles de départ différentes, les courses le seraient aussi, ce n’est pas bien de voir Mercedes à l’avant de la grille sans compétition, c’est ce dont je me suis plaint" explique Bernie Ecclestone.

Bien que des difficultés puissent apparaître pour les équipes du haut de classement, et rendre la moindre erreur sur un tour chronométré bien plus pénalisante, le niveau de performances de Mercedes mettra rapidement ses pilotes à l’abri. Lors des 16 qualifications disputées sur le sec en 2015, le premier tour chronométré parcouru en Q3 par les Mercedes les a automatiquement mises à l’abri à 15 reprises.

Si les autres équipes ne peuvent pas battre Mercedes en fin de Q3 quand la piste est pourtant dans de meilleures conditions, elles ne pourront pas plus le faire en début de séance, ce qui serait nécessaire pour éliminer Hamilton ou Rosberg. C’est à Bahrein que Ferrari a battu le premier tour chronométré d’une Mercedes, lors de la dernière minute de la séance, mais en ayant déjà chuté à ce moment-là en sixième ou septième position, ce qui aurait valu une élimination sous le nouveau format. On ne fait donc que déplacer le problème.

Le timing sera essentiel pour établir un temps

En plus de jauger la performance des équipes rivales en Q1 et Q2, les équipes devront maintenant s’assurer d’être déjà hors d’atteinte lorsque les éliminations débutent, c’est-à-dire après sept minutes de qualifications. L’objectif de voir plus de voitures en piste sera atteint puisqu’en 2015, il y avait généralement huit pilotes qui n’étaient pas encore sortis de leur box au bout de sept minutes.

Les pilotes pourraient vouloir se lancer en piste coûte que coûte, même en risquant d’être gênés par un de leurs concurrents, préférant tenter d’établir un temps rapide que de perdre du temps et risquer l’élimination. De nombreux pilotes seront sûrement en piste très tôt afin de pouvoir s’assurer un deuxième essai. Compte tenu des tours d’entrée et de sortie, les premiers pilotes éliminés n’auront sans doute pas ce deuxième essai.

La Q2 étant plus courte, les pilotes n’auront qu’un temps limité pour se mettre à l’abri et tenter d’accéder à la Q3. Mais c’est dans cette dernière que les modifications seront les plus visibles. Alors qu’on voyait les dix pilotes établir un chrono en fin de séance avec le format actuel, les derniers moments de cette partie ne mettront en scène que les deux pilotes les plus rapides.

Verrons-nous plus de spectacle ?

La pression sera élevée avec ce système à éliminations, puisque le moindre contre-temps sera très problématique en vue d’un passage à la phase suivante. On pourrait toutefois voir des éliminations surprenantes ne pas se produire, comme ce fut le cas à Abu Dhabi la saison dernière. Vettel avait mal jugé la sécurité de son tour chronométré et avait été dépassé en toute fin de Q1, ce qui ne serait pas arrivé avec la majorité des pilotes éliminés.

La difficulté de ce règlement s’ajoute à celle du règlement pneumatique qui permet aux équipes de choisir les composés qu’elle utilisera et leur permet un jeu supplémentaire de pneus les plus tendres.

Des points sont encore à définir et le report annoncé par Bernie Ecclestone permettra à la FIA de gérer tout ça en temps et en heure plutôt que de lancer un système dans lequel des points d’ombres subsistent.

Quel est vraiment l’avantage que l’on tirera de cette nouveauté ? Les éliminations surprenantes étaient déjà monnaie courante avec le système actuel, et on voit difficilement comment Mercedes pourrait perdre la pole position de manière régulière. Pourquoi tabler sur une des parties de la Formule 1 qui soulève le moins de contestation ? Il y a des chantiers bien plus importants que le format des qualifications.

On a toutefois évité une très mauvaise idée de la part de Bernie Ecclestone qui voulait pénaliser le pilote le plus rapide par un ajout d’une ou plusieurs secondes à son meilleur temps. Le côté hasardeux de ces qualifications pourrait finalement pénaliser les pilotes qui ne possèdent pas un vrai avantage de performances, c’est-à-dire les concurrents de Mercedes, et il ne serait pas étonnant que ce format facilite les choses à Rosberg et Hamilton sur l’ensemble d’une saison.

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