Pourquoi embellir les monoplaces si l’on doit leur ajouter le halo ?

Un faux pas esthétique

Par Emmanuel Touzot

18 février 2017 - 18:51
Pourquoi embellir les monoplaces (...)

La dernière décennie ayant été marquée par de nombreux accidents ayant touché la tête des pilotes en F1 (Massa, Bianchi) et ailleurs (Surtees, Wilson), il est apparu aux autorités dirigeant la F1 que l’une des seules failles de sécurité, en tous cas la plus évidente, était le manque de protection du casque et de la tête qu’il entoure.

Depuis, plusieurs développements ont été diligentés afin de trouver une solution viable pour que ces voitures, conçues ouvertes, soient quasiment fermées au niveau du cockpit. Red Bull a développé l’Aeroscreen, une bulle souple et solide, mais en a abandonné la conception suite aux contraintes annoncées, et c’est le halo, testé à plusieurs reprises l’an dernier, qui tient la corde pour être instauré.

Cependant, son avenir est loin d’être assuré puisque plus de la moitié des pilotes s’est prononcée contre, arguant essentiellement le défaut esthétique. Bien qu’il soulève des incertitudes quant à la sécurité des pilotes, par exemple en cas de retournement de la voiture ou au niveau de la visibilité, c’est surtout l’aspect esthétique qui joue contre lui.

Conscients du danger qui entoure leur métier, les pilotes militent depuis plusieurs années pour une Formule 1 plus attrayante visuellement, basée sur la vitesse et sur un aspect esthétique qui traduit cette recherche de performance.

La Formule 1, en quête perpétuelle de sécurité, peut-elle faire cette seule concession sur l’autel du spectacle et de l’esthétique ? C’est une question difficile car dire un "oui" automatique reviendrait à négliger le fait que trois pilotes ont perdu la vie dans trois disciplines à monoplaces ouvertes depuis 2009.

Bien sûr, on ne peut pas faire comme si ces accidents n’avaient pas eu lieu, et les pilotes qui votent en faveur du halo le font certainement parce qu’ils ont pris conscience que chacun d’entre eux était encore exposé à un accident sérieux, et pour que ces accidents fatals n’aient pas été vains.

Ceux qui votent contre le halo ont compris, ou du moins validé le fait qu’ils se mettaient en danger du moment où ils rentrent dans la voiture, et que chacun des sports mécaniques existants n’est pas exempt de danger.

La Formule 1 a vécu trois décès entre 1987 et 2016, soit en trente saisons, alors qu’elle avait par exemple perdu deux pilotes lors de la seule année 1982. La sécurité n’est plus à prouver et l’on sait que sans tous les progrès effectués depuis 1994, la liste noire comprendrait aussi Karl Wendlinger, Mika Häkkinen, Luciano Burti, Robert Kubica, Heikki Kovalainen, Felipe Massa ou encore Fernando Alonso.

Tant de noms sauvés par les progrès apportés dans le domaine de la sécurité qui permettent de faire de la F1 un sport très sûr aujourd’hui. Toutefois, cette sécurité a un prix, comme les grandes zones de dégagements sur les circuits ou la quasi disparition de vraies courses sous la pluie.

Les pilotes s’accommodent globalement bien de ces concessions mais ne semblent pas décidés à valider l’apparition du halo dans un futur proche, alors que la FIA veut l’introduire dès 2018.

Bien que la sécurité des pilotes soit la priorité de tout le monde, il est difficile de ne pas abonder dans le sens des pilotes qui veulent que les F1 gardent un look agressif et qu’elles soient plaisantes à regarder, d’autant que c’est la raison principale du changement de règlement de cette saison.

Dans ce cas, quel intérêt de pousser vers des monoplaces plus jolies, plus agressives, si c’est pour apposer devant la boîte à air une protection disgracieuse ? Que deviendront les lignes acérées de ces nouvelles monoplaces une fois que cette structure amovible sera disposée au-dessus du pilote ?

L’idée d’une bulle à la manière d’un avion de chasse pose des problèmes de sécurité en cas de retournement ou d’incendie et ne peut pas être retenue, mais on convient qu’elle aurait sa place face à ce halo décidément peu esthétique.

Avec la moitié des pilotes toujours contre, on peut difficilement penser que la FIA arrivera à l’introduire, et encore moins en 2018, si aucun nouvel élément ne vient perturber cette réflexion. Enfin, si Liberty Media s’intéresse réellement à l’avis des fans, comme elle prévoit de le faire, elle pourra également constater l’étendue des avis négatifs à son encontre parmi les spectateurs de la discipline.

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