Andy Stevenson, le précieux directeur sportif d’Aston Martin F1 livre ses secrets
Comment performer toujours après 33 ans en F1 ?
C’est une figure dans le paddock : Andy Stevenson est actuellement le directeur sportif d’Aston Martin F1 (et l’employé avec le plus d’ancienneté au sein de l’équipe de Silverstone !).
Stevenson a plus de trois décennies d’expérience en F1 – et a justement livré certaines clefs des qualités requises pour réussir dans ce sport, aussi bien et aussi longtemps.
La première : l’adaptabilité.
« Le sport automobile est une industrie qui évolue très, très rapidement - il faut donc bouger et s’adapter aussi vite que le sport. Je me souviens toujours de l’adage : si l’on fait les mêmes choses, on obtient les mêmes résultats. C’est pourquoi je cherche toujours à améliorer mon travail. Au tout début chez Jordan, nous avions l’habitude de dire : "Il y a toujours une façon plus intelligente de faire". »
Cette adaptabilité vaut aussi pour la fonction même de Stevenson : d’ailleurs, que recouvre exactement le terme de directeur sportif ?
« Ma position de directeur sportif s’est construite au cours des nombreuses années que j’ai passées dans cette équipe, mais le même rôle dans une autre équipe nécessiterait un ensemble de compétences très différent. J’ai davantage un background tourné vers le sport et l’opérationnel, alors que d’autres directeurs sportifs sont plus orientés vers l’ingénierie. Adapter ses compétences aux besoins de l’entreprise est un aspect important. »
L’adaptabilité va cependant de pair avec une autre exigence : la rigueur dans le suivi des processus. Quitte à les changer s’ils ne conviennent pas !
« En F1, nous sommes très axés sur les processus. Nous mettons en place des processus pour garantir que les bonnes choses sont faites au bon moment, mais nous sommes toujours prêts à les adapter si nous pensons qu’il y a place à l’amélioration quelque part. »
« La résolution des problèmes est souvent une question d’expérience. Beaucoup de choses peuvent mal tourner, mais on rencontre souvent les mêmes types de problèmes. Cela dit, il faut réfléchir très vite et être conscient de la situation qui se développe autour de soi. »
Une autre qualité requise du directeur d’équipe touche à l’analyse des données. En particulier en week-end de Grand Prix quand chaque information compte.
« Lorsque je suis assis sur le muret des stands, je ne me contente pas de me détendre en regardant Sky Sports, j’essaie de me faire une idée de ce qui se passe réellement tout autour du circuit à un moment donné. J’ai sept feeds vidéo ouverts sur le muret des stands - nos voitures, les voitures des autres équipes, le flux international. Ainsi, tour par tour ou même virage par virage, je peux me faire une idée de ce qui se passe autour de nos voitures et sur la piste. Ainsi, lorsque quelque chose se produit, je dispose d’un maximum d’informations pour prendre la bonne décision. »
« En plus de ces sept écrans, j’écoute également une quinzaine de radios. Il n’est donc pas surprenant que l’on se retrouve un peu à bout de nerfs après une course, car l’esprit a travaillé intensément pendant les deux heures qui ont précédé. »
Quid de l’équilibre vie pro/perso en F1 ?
On l’imagine, le travail de directeur sportif est aussi éreintant. C’est pourquoi, et c’est une autre clef du succès, Stevenson s’attache à séparer le pro du perso.
« Je ne ramène jamais le stress du travail à la maison. S’il y a un problème que j’essaie de résoudre, j’essaierai de le terminer avant de quitter le bureau si je le peux. Écouter de la musique en voiture sur le chemin du retour m’aide également à me détendre. Si vous ne permettez pas à votre cerveau de se détacher des problèmes professionnels, vous finirez par passer une mauvaise nuit et vous souffrirez le lendemain. »
« Je crois aussi beaucoup à l’idée d’examiner certains problèmes avec un regard neuf le lendemain matin, si c’est possible. Très souvent, ce qui a semblé être un désastre peut être résolu très rapidement le lendemain. »
La confiance placée dans les employés est aussi primordiale, tout comme leur bien-être au travail.
« Nous employons beaucoup de personnes très intelligentes chez Aston Martin, alors si vous ne leur permettez pas de faire leur travail correctement, quel est l’intérêt de les avoir ici ? Il est de ma responsabilité de donner à tous les membres de l’équipe ce dont ils ont besoin pour faire leur travail. »
« Je ne suis pas là pour leur dire comment faire leur travail ; je suis là pour m’assurer qu’ils aient tout à leur disposition pour faire les choses correctement - que ce soit en arrivant sur le circuit avec le moins de stress possible, un hôtel confortable, les outils et la technologie dont ils ont besoin pour faire leur travail. »
Autre qualité humaine requise : l’humilité. Et notamment face à la concurrence.
« Il faut regarder de haut en bas de la pitlane pour trouver l’inspiration - il ne faut pas se concentrer uniquement sur les équipes de tête. Toutes les équipes de la F1 moderne font les choses très, très bien : le niveau est constamment élevé. Ne sous-estimez jamais l’opposition. »
L’exigence est enfin de mise... il faut dire que Stevenson a été formé à rude école, celle d’Eddie Jordan pour qui le concept de repos le soir avait peu de réalité...
« J’attends le meilleur de moi-même chaque jour. »
« Dès mon premier jour dans l’équipe, Eddie Jordan m’a dit que je n’irais pas au-delà de la fin du mois. Je n’ai pas réalisé avant longtemps que c’était sa façon de tirer le meilleur de moi : il voulait s’assurer que je n’allais pas m’asseoir et faire le strict minimum, il voulait que je me surpasse. »
« Je me suis dit "Bon, je vais lui montrer" et j’ai travaillé jusqu’à 10 ou 11 heures tous les soirs, en faisant de mon mieux. Et Eddie rentrait chez lui avec un grand sourire, en se disant : "Heh, je l’ai mis là où je voulais !" »
« Je suis toujours là aujourd’hui, grâce à ce qu’Eddie m’a dit lors de mon premier jour en 1987 - peut-être ne pas travailler jusqu’à 10 ou 11 heures tous les soirs, mais certainement me mettre au défi de faire de mon mieux chaque jour. »
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