Alpine F1 : Szafnauer réagit aux affaires Piastri et Alonso

Il ’sait’ pourquoi Alonso est parti et dénonce ’le manque de loyauté’ de Piastri

Par Franck Drui

7 août 2022 - 11:56
Alpine F1 : Szafnauer réagit aux (…)

Alpine F1 a enfin réagi au rejet d’Oscar Piastri de courir pour elle en 2023, ce qui signifie certainement que l’Australien s’est engagé de manière ferme avec une autre équipe, McLaren F1 en l’occurrence.

Jusqu’à présent, seul un porte-parole avait réagi indiquant que l’équipe estimait être dans son bon droit concernant la titularisation de Piastri.

Otmar Szafnauer, le directeur d’Alpine F1, s’est enfin longuement confié sur cette affaire, à El Confidencial, en revenant tout d’abord sur l’annonce surprise de Fernando Alonso de rejoindre une équipe concurrente sans prévenir ses patrons.

"C’était la première fois que je vivais quelque chose comme ça, c’est sûr. Bien que je ne sois pas complètement surpris, car j’ai vécu d’autres situations et histoires des deux côtés, du côté des pilotes et du côté des équipes. Mais, dans mon cas, je n’avais jamais rien vécu de tel."

"Le ’Piranha Club’ en pleine action ? Je pense que c’est le capitalisme à son meilleur. Rien n’est sûr jusqu’à ce qu’il soit signé… Nous avons eu de nombreuses conversations avec Fernando, nous voulions qu’il reste, évidemment il avait aussi les siennes avec Aston Martin… Donc ce sont les détails du contrat qu’ils mettaient sur la table qui l’intéressaient le plus que certains des détails dont il devait discuter avec nous."

Un tacle envers Alonso sur l’intégrité

Szafnauer n’hésite pas à tacler Alonso sur le respect des engagements, même pris à l’oral, alors que les deux hommes discutaient. S’est-il senti trahi ou déçu lundi matin, à 10h, à l’heure de l’annonce publique ?

"Comme je l’ai déjà dit, un peu des deux. Je ne peux pas être assez naïf pour ne pas connaître les règles du jeu de la Formule 1, j’ai vécu de nombreuses histoires. Mais personnellement, je crois que je suis un homme intègre et que si je m’engage dans quelque chose, je ferai de mon mieux pour que cela se produise."

"Je tiens parole, c’est la façon dont j’ai grandi, ce que mon père m’a transmis. Je l’ai fait avec Sebastian Vettel, avec Julian Jacobi - qui gérait Ayrton Senna et maintenant Sergio Pérez -, avec Anthony Hamilton quand il représentait Paul di Resta... Mais bon, j’ai compris que tout le monde ne fait pas les choses de la même manière."

"Alonso m’a dit dimanche soir qu’il allait sur une île grecque sur un bateau, je pense qu’il l’a mentionné, mais pas pour que je l’accompagne. Je l’ai appelé plusieurs fois dans la matinée et je n’ai pas réussi à le joindre. C’est ce qu’il m’a dit, qu’il serait difficile de le localiser, c’est pourquoi il a dit cela. Concernant la déclaration de Piastri, une fois que nous avons entendu parler de Fernando avec Aston Martin, comme nous travaillions avec lui pour l’année prochaine et que nous avons vu que la continuité d’Alonso n’était pas possible, nous avons sorti le communiqué de presse."

"Nous avons un contrat avec Piastri"

Alpine F1 avait trois excellents pilotes le 31 juillet, plus que deux le 1er août, dont un qui veut s’en aller. Mais Szafnauer espère encore pouvoir garder Piastri l’année prochaine, bien que cela doive se jouer devant les avocats.

"Ce n’est pas encore définitif. Nous avons un contrat avec Piastri, qu’il a signé en novembre, nous avons parlé avec nos avocats et ils nous ont dit qu’il s’agit d’un contrat contraignant, donc une partie de ce contrat nous permet de mettre Oscar dans l’une de nos voitures en 2023, c’est pourquoi nous avons publié le communiqué de presse."

"Il y a aussi une option pour 2024 et la possibilité pour nous de « prêter » le pilote à une autre équipe. Nous voulions Fernando avec nous un an de plus, puis un prêt d’Oscar pour 2023. Je l’ai toujours dit dans toutes mes conférences de presse, que Piastri serait en Formule 1 en 2023 et c’est parce que je savais qu’il pourrait être dans notre voiture ou dans une autre, en prêt, si Fernando était resté."

"Mais Alonso, pour une raison quelconque - et je pense que je connais les raisons, même si vous devriez lui demander - va chez Aston Martin. Nous avons donc commencé à finaliser l’accord avec Piastri, et au lieu de le prêter, nous avons décidé de le mettre dans notre voiture. D’où la déclaration."

Szafnauer "ne comprend pas" Piastri

Mais Oscar Piastri a déclaré qu’il ne voulait pas courir avec Alpine. Pourquoi chercherait-il une autre équipe que celle qui lui a payé toute sa carrière sportive jusqu’en Formule 1 ?

"Je pense que c’est une question pour Piastri, parce que je ne comprends pas non plus. Je suis relativement nouveau dans l’équipe. La direction que nous avons de Luca de Meo est magnifique, le soutien qu’il nous apporte est fantastique, il a sauvé l’équipe. Laurent Rossi , mon patron immédiat et PDG d’Alpine, est un grand homme d’affaires pour la marque, y compris l’écurie de Formule 1… Tout cela est magnifique et nous l’avons partagé avec les pilotes."

"Luca de Meo a une grande vision, il a ressuscité la marque. Les voitures et leurs bénéfices financent l’équipe, ce qui est un excellent moyen de marketing pour la marque. Le plan stratégique est très bon et Piastri le sait. Mieux même que McLaren. Nous sommes devant eux au championnat et nous espérons être devant eux à la fin."

"L’avenir de l’équipe ? Nous avons un gros budget et des gens avec beaucoup d’expérience. Je viens d’arriver, je connais les domaines à renforcer, l’équipe technique, nous recrutons des personnes dans les domaines que nous devons améliorer et nous mettons en place de nouveaux outils."

"Dans notre avenir, dans ce plan de 100 courses sur lequel nous travaillons tous, je pense qu’il y a aussi de la place pour Piastri. Et nous l’avons soutenu. Il devrait y avoir une certaine fidélité au fait que nous avons littéralement investi des millions et des millions d’euros pour le préparer. Donc je ne comprends pas non plus, vous devriez lui demander."

Alpine voulait augmenter le salaire d’Alonso

Szafnauer indique connaitre les raisons du départ d’Alonso. Selon lui, c’est bel et bien le problème de la durée de contrat, et le Roumain explique pourquoi il n’était pas certain que prolonger l’Espagnol de deux ans pour des raisons liées à l’âge.

"Il faudrait lui demander, mais pour Alonso, un engagement à long terme de l’équipe était très important. Un contrat de deux ans, même si c’était un plus un. Je pense que l’une des clés pour Fernando a été la prolongation du contrat. Il roule à un très haut niveau et je lui ai dit que s’il continuait à ce niveau, l’année prochaine on continuerait sûrement, on serait fous de ne pas le faire."

"Mais, comme pour tout le monde dans la vie, il arrive un moment où l’âge affecte vos capacités psychologiques, vos yeux, votre cerveau, vos muscles, votre système nerveux... Ils déclinent. Schumacher, à 42 ans, a été battu par Rosberg. A 38 ans, ça ne serait pas arrivé. Et ça nous arrive à tous, footballeurs, joueurs de snooker, joueurs de cricket - je vis en Angleterre, quand je vivais en Amérique je ne connaissais rien à ce sport. Le cricket n’est pas un sport très physique."

"L’essentiel est de savoir comment on juge la trajectoire de la balle, comment elle rebondit, comment on déplace la batte de quelques centimètres... Et, à un certain âge, les joueurs sont encore bons, mais ils ne peuvent pas faire comme quand ils l’étaient. plus jeune. Pour cette raison, nous pensions qu’avec Fernando, c’était un an, plus un an, plus un an. Mais il voulait des garanties de plus de temps."

Il y a aussi eu des rumeurs de désaccords sur le salaire à paye à Alonso, mais Szafnauer assure qu’Alpine a fait du mieux possible : "Je ne sais pas combien ils vont le payer chez Aston Martin, pour être honnête, je ne sais pas. Ce que je sais, c’est que nous lui avons offert plus d’argent que nous ne le payons maintenant, ce qui est logique."

"C’est un chiffre qu’au début il a essayé de négocier, comme tout le monde, mais à la fin nous sommes parvenus à un accord, formellement. Mais je ne sais pas, j’ai entendu des rumeurs selon lesquelles ils lui auraient fait une offre très élevée. Je ne sais pas si c’était un facteur décisif, demandez-lui."

"Chaque pilote savait ce qui se passait"

Tout cela ressemble à un grand gâchis vu de l’extérieur : un projet Alpine / Renault relancé, avec son double champion du monde de l’époque et tout s’envole... y compris le remplaçant prometteur potentiel, sur lequel l’équipe misait à long terme.

"Je ne m’y attendais pas. Lorsque Piastri, par exemple, a signé le contrat avec Alpine en novembre, il était là et ne savait rien. J’ai toujours vu que Laurent Rossi essayait de faire ce qui était le mieux pour les deux pilotes. Avec les contrats, avec Fernando, qui voulait continuer, avec Oscar, qui voulait un baquet en 2023... et Rossi a donné son accord, Laurent a travaillé très dur pour lui trouver ce baquet pour l’année prochaine."

"Chez Alpine, nous essayions de faire ce qui était le mieux pour les deux pilotes, sans essayer de jouer avec l’un d’eux, en étant transparents avec eux. Chaque pilote savait ce qui se passait. Malheureusement, Alonso a signé avec Aston Martin et je comprends pourquoi. Mais avec Piastri, non."

Szafnauer attendait "plus de loyauté" de Piastri

N’y a-t-il pas eu un peu de naïveté et une collusion entre Alonso, Piastri, Mark Webber et Flavio Briatore, des gens liés et proches ?

"Voulez-vous dire qu’ils peuvent avoir partagé des informations entre eux ? Écoutez, je n’en ai aucune trace, mais c’est la Formule 1 et peut-être que dans quelques années, quelqu’un dira qu’il a des preuves d’informations partagées, je ne serais pas surpris. Je dis toujours à tout le monde qu’en Formule 1, il faut faire comme si tout le monde savait tout. Qu’il n’y a pas de secrets dans ces choses. Quand vous demandez à quelqu’un de ne rien dire, il agit comme si tout le monde le savait. Et c’est ainsi que j’ai dirigé ma barque en Formule 1 pendant 25 ans. Et si le partage d’informations s’est produit, il ne faut pas être surpris."

"Cependant, je m’attendais à plus de loyauté de Piastri. Il devrait l’avoir avec cette équipe qui a pris soin de lui, qui l’a emmené jusque-là et, surtout, qui au cours de la dernière année l’a mis dans une Formule 1 pour qu’il soit prêt, pour qu’il connaisse les circuits. Je m’attendais à plus de loyauté d’Oscar qu’il n’en montre. J’ai débuté en 1989 en Formule 1 et je n’avais jamais rien vu de tel."

"Et il ne s’agit pas de Formule 1, mais d’intégrité en tant qu’être humain. Cela pourrait arriver au hockey sur glace ou dans le football, peu importe. Mais ce n’est pas la F1. Il a signé un papier, un document, disant qu’il ferait quelque chose de différent. Pour moi, si l’on dit ’aide-moi, demain je t’aiderai’, en aucun cas on ne revient sur sa parole. Certainement pas."

Beaucoup de pilotes montrent leur intérêt

Sans Piastri, sans Alonso… Quel sera l’avenir d’Alpine ? Tout indique que Daniel Ricciardo pourrait effectuer son retour dans l’équipe, deux ans après l’avoir quittée. Szafnauer compte encore sur Piastri mais sait qu’il doit se préparer à son absence. La bonne nouvelle est qu’il ne manque pas de candidats potentiels.

"Alonso va chez Aston Martin. Nous avions un contrat avec Piastri et nous devons comprendre où cela nous mène légalement. Nous croyons, et c’est pourquoi nous avons publié cette déclaration, que nous avons un contrat contraignant. Passons un peu de temps à étudier où cela nous mène. Et si Piastri n’est pas dans la voiture - et je pense qu’il le sera - parce que Fernando est parti, j’ai environ quatorze appels téléphoniques de pilotes intéressés, car le baquet Alpine est le meilleur qui reste."

"Pas étonnant que tant de gens m’appellent, mais sur ces quatorze, il en restera quatre sur la liste finale. Et parmi eux se trouve Piastri."

Et si Piastri s’en va, Alpine F1 se retournera-t-elle contre le pilote ? Une compensation financière pour tout ce qui a été investi au fil des ans ?

"Tout d’abord, voyons où nous en sommes légalement avec Oscar. Nous avons un contrat qui dit que nous devons le soutenir dans sa carrière jusqu’en Formule 1 en investissant beaucoup d’argent. Mais surtout, il faut tenir compte que l’année dernière nous avons mis une monoplace en piste pour lui et qu’il a parcouru 3 500 kilomètres. Nous avons fait sept tests indépendants avec et ce n’est pas bon marché. Seul le coût d’un moteur est de 1 750 000 euros. Les mécaniciens, l’équipe qui a géré ces tests, les vols et les voyages… Nous avons dépensé beaucoup, beaucoup d’argent sur Piastri pour le préparer pour l’avenir. Et, si cet avenir n’est pas avec nous, il est logique et juste que nous cherchions une compensation."

Alpine F1 Team - Renault

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