Wolff : J’ai arrêté d’analyser ce qu’il se passait dans la tête d’un pilote

Hamilton et Rosberg passés au crible

Par Franck Drui

13 novembre 2016 - 16:00
Wolff : J'ai arrêté d'analyser

Mercedes s’apprête à vivre un Grand Prix du Brésil qui peut s’avérer décisif dans la course au titre entre ses deux pilotes, Nico Rosberg et Lewis Hamilton.

Le pilote allemand a clairement son destin entre les mains : s’il remporte la course, il sera assuré du titre. D’autres scénarios peuvent aussi le couronner, du moment qu’il réussit à marquer 6 points de plus au moins que son équipier ce dimanche.

Mais cette saison semble aussi avoir été marquée par les hauts et les bas de Lewis Hamilton. Comment Toto Wolff, le patron de Mercedes en F1, explique-t-il cela ?

"Déjà, il faut savoir qu’en F1, ce n’est pas comme en tennis ou en football, où la raquette et le ballon s’avèrent autrement plus fiables qu’une monoplace. La fiabilité joue un rôle très important et Lewis n’a pas eu beaucoup de réussite hélas dans ce domaine cette saison," reconnait l’Autrichien dans les colonnes du Figaro.

"Après, pour être franc, j’ai arrêté d’analyser ce qu’il se passait dans la tête d’un pilote. C’est trop complexe et je ne suis pas sûr qu’eux-mêmes le sachent. Lewis a toujours besoin d’une motivation extrêmement forte et il est possible qu’après avoir remporté ce deuxième titre d’affilée (avec Mercedes), il ait perdu ce surplus d’envie qui lui est indispensable pour performer."

"Et puis en voyant que le titre est peut-être en train de lui échapper, il retrouve pleinement son niveau. C’est une interprétation, mais je ne sais pas si c’est la bonne. En fait, je ne m’explique pas ces cycles de victoires de l’un puis de l’autre…"

"Pareil pour les derniers grands prix où un coup c’est l’un qui domine totalement, puis ensuite c’est l’autre. Ils sont d’un niveau très proche sur la saison, mais pas forcément au même moment ni sur chaque course. Pourquoi ? J’ai des idées sur la question mais aucune certitude et je ne cherche plus à en avoir."

Hamilton a tout de même suggéré qu’il risquait de perdre ce titre à cause de problèmes liés à l’équipe...

"Cela m’énerve car rationnellement, c’est injuste. Mais justement, j’ai conscience qu’il est très difficile pour un pilote d’être en tête d’une course, de voir son moteur lâcher et de devoir, quelques minutes plus tard, donner son sentiment. C’est normal qu’il y ait alors de l’émotion et de la frustration. A ce moment-là, je n’attends pas des pilotes qu’ils soient totalement « corporate » et qu’ils disent exactement ce que j’attends d’eux. Je comprends l’émotion qui est la leur. Et concernant l’épisode que vous évoquez (la Malaisie), après avoir parlé avec Lewis, il a reconnu que c’était impossible qu’une telle situation survienne."

Cette saison aura tout de même été marquée par la montée en puissance de Nico Rosberg, qui semble s’être affirmé de manière plus ferme face à Lewis Hamilton. Wolff admet que gérer les deux hommes est bien délicat.

"C’est un job et celui-ci me plait. Les pilotes forment une espèce ultra compétitrice très intéressante à voir évoluer. Et c’est passionnant d’essayer de leur donner un environnement qui leur permette de performer de la meilleure façon. Après, j’aime aussi le fait de trouver le bon équilibre entre les manager et ne pas trop les manager, car cela ne va pas fonctionner. Je pense qu’en cela, mon rôle se rapproche de celui d’un entraîneur de football où il faut contrôler onze ego et s’assurer qu’ils jouent ensemble, tout en ayant l’autorité de prendre des décisions. A ceci près qu’il y a l’aspect business en plus en F1 qui vient encore complexifier ma tâche. Mais c’est sans doute tout cela qui fait que cela me plait toujours autant."

Cela ne les empêche pas de se déchirer de temps à autre...

"Oui, c’est arrivé. Je n’ai pas été déçu par leur accrochage à Barcelone cette année car cela n’était plus arrivé depuis une quinzaine de courses. J’ai accepté cela comme s’il devait s’agir d’un « one shot », ce qui arrive dans toutes les écuries. En revanche, j’ai été très déçu par ce qu’il s’est passé en Autriche. Nous étions dans le dernier tour de course et la défense avait été trop dure, tout comme l’attaque avait été également trop dure. Ils ont risqué de se mettre dehors alors que le doublé était certain, sur le circuit de notre rival (Red Bull). J’ai trouvé que cela ne respectait pas l’effort que tous les techniciens fournissaient pour leur offrir de telles voitures. Et je leur ai dit très clairement ce que je pensais."

Rosberg a donc une grande chance d’être titré cette année. Mais si les évènements venaient à se retourner finalement contre lui, Wolff n’aurait-il pas peu de voir l’Allemand craquer ?

"Non car Nico ne lâche jamais. C’est une partie très importante de son caractère. Après une mauvaise course, il a cette capacité de l’analyser, de la comprendre et de… l’oublier pour passer à la suivante. Et Nico est lié à nous pour encore deux autres saisons et il sait qu’il aura, dans le pire des cas pour lui, deux autres opportunités d’atteindre son but."

Mercedes va devoir composer avec le même duo, sauf surprise, jusqu’à la fin de la saison 2018. Wolff a-t-il imaginé d’autres scénarios ?

"Si, nous nous sommes posé la question après certains accrochages. Cette saison, il y a eu deux moments très délicats après Barcelone et l’Autriche. Dans les deux cas, l’animosité entre les deux avait atteint un niveau tel qu’il commençait à nuire à la performance et à l’esprit général de l’équipe. Nous avions l’impression que tous les efforts qui étaient mis en œuvre pour avoir une voiture performante étaient détruits par cette rivalité sur le circuit. Mais aujourd’hui, la situation est rentrée dans l’ordre et on voit que l’un et l’autre se tirent vers le haut. L’état d’esprit est excellent et nous sommes ravis de la phase actuelle entre les deux. C’est bénéfique pour toute l’équipe. Mais si un jour leur rivalité devient trop néfaste sur le long terme, alors nous changerons."

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