Sainz-Norris chez McLaren : pari audacieux ou déclassement stratégique ?
Une perte de niveau par rapport à 2016 indéniable
L’an prochain, le duo de pilotes de McLaren sera à 100 % renouvelé : Carlos Sainz et Lando Norris succéderont à Fernando Alonso et Stoffel Vandoorne. Ces deux signatures s’inscrivent, comme l’a confirmé Zak Brown, dans un plan de redressement à moyen de terme de l’écurie, sur la période 2019-2024.
Or à bien des égards, ce line-up nouveau apparaît comme un ton en-dessous de celui de 2018 ou des années précédentes.
En raison de sa nationalité, Carlos Sainz est forcément comparé à Fernando Alonso et il ne faut pas disposer d’une prodigieuse perspicacité pour reconnaître que McLaren y perdra en changeant d’Espagnol. Alors que le double champion du monde a totalement mis sous l’éteignoir Stoffel Vandoorne et a réussi des bons coups quand cela était possible, Carlos Sainz a perdu le duel qui l’opposait à Max Verstappen pour grimper dans le baquet Red Bull lorsqu’il affrontait le Néerlandais, s’est vu devancé par Pierre Gasly pour y aller l’an prochain, et n’a pas été retenu par Renault pour la saison prochaine.
La comparaison entre Lando Norris et Stoffel Vandoorne n’apparaît pas forcément plus avantageuse. Le Belge avait écrasé littéralement la saison 2015 de GP2, mais il s’agissait de sa deuxième dans cette catégorie. Pour sa première saison en GP2, en 2014, il avait signé 4 victoires, 4 poles positions, et 10 podiums. Pour sa première saison en F2, cette année, Lando Norris a seulement remporté (à quatre courses de la fin) une seule course, pour une pole et 8 podiums. George Russell, protégé de Mercedes, marque davantage les esprits pour le moment.
Si l’on se réfère à 2016, la comparaison est plus douloureuse encore : à ce moment, McLaren pouvait compter sur deux champions du monde, Jenson Button et Fernando Alonso ; en 2019, McLaren se retrouvera avec deux pilotes n’étant jamais monté sur un podium de F1.
Le line-up de McLaren paraît alors avoir le pedigree d’une écurie de milieu de grille, mais certainement pas celui d’une écurie de pointe. Dans le passé ou encore aujourd’hui, Ferrari (Charles Leclerc), Red Bull (Pierre Gasly), McLaren (avec Lewis Hamilton en 2007) ont envisagé d’aligner un jeune pilote, un pari sur l’avenir, sur la grille ; mais ce jeune pilote était toujours accompagné d’un champion du monde (Sebastian Vettel, Fernando Alonso) ou d’un vainqueur en Grand Prix (Max Verstappen).
McLaren a certes voulu retenir un pilote de pointe dans son line-up : toutefois, Fernando Alonso, lassé des performances de l’écurie, a préféré quitter la F1, tandis que Daniel Ricciardo a finalement choisi Renault.
Le duo de McLaren peut, il est vrai, apparaître dans ces conditions comme un pari audacieux sur l’avenir, étant donné la jeunesse des deux pilotes ; mais il s’agit possiblement davantage d’un duo de compromis, d’un duo par défaut, d’un duo qui ressemble fort à une preuve du déclassement stratégique acté de McLaren, une écurie qui n’est plus en mesure d’aligner un pilote de pointe.
La question du déclassement se pose également sur le plan financier : avec Lando Norris et Carlos Sainz sous contrat, McLaren fera des économies substantielles en ne versant plus à Fernando Alonso un salaire mirobolant. Au moment où Zak Brown réclame au plus vite l’introduction de budgets plafonnés, le duo Sainz-Norris est donc une nouvelle illustration de l’incapacité structurelle de McLaren à pouvoir lutter avec Red Bull, Ferrari, Mercedes ou même désormais Renault sur le marché des pilotes.
Le mal le plus grand pour McLaren, ne concerne cependant sa paire de pilotes : comme l’a redit Zak Brown à Monza, le fait est que Woking a construit une « mauvaise voiture de course » cette année, bien en-deçà des attentes. Tant que McLaren ne montrera pas qu’elle n’a pas perdu son savoir-faire technique, retrouver un line-up non pas seulement prometteur sur le papier, mais bel et bien supérieur à ses rivaux directs, s’annonce comme une tâche impossible.