Le défi de Montréal, côté moteur
Renault nous explique cela
Le Championnat du Monde de Formule 1 reprend ses droits à l’occasion du Grand Prix du Canada, passant du circuit le plus lent de l’année — Monaco — à celui où le temps au tour est le plus court. Long de 4,361 km, le circuit Gilles-Villeneuve est parcouru en seulement 75 secondes environ.
Renault a de bons souvenirs du Canada, s’étant imposé à quatre reprises à Montréal. La première victoire du partenariat Williams-Renault y a été enregistrée en 1989, grâce à Thierry Boutsen. Elle a été suivie de deux autres victoires, en 1993 avec Alain Prost et 1996 avec Damon Hill. Fernando Alonso s’y est imposé en 2006 pour le Renault F1 Team.
Quelques éléments clés du Grand Prix du Canada
Les longues lignes droites du circuit Gilles-Villeneuve demandent un faible niveau d’appuis aérodynamiques, alors que les virages très serrés et la chicane qui termine le tour réclament de la stabilité lors des puissants freinages. Le RS27 doit combiner une puissance maximale élevée avec un frein moteur efficace et de bonnes reprises pour les entrées et les sorties de courbes.
La direction du vent peut avoir une influence sur le choix du septième rapport de la boîte de vitesses. Le circuit étant situé sur les rives du fleuve St Laurent, les conditions climatiques sont très changeantes. La sélection des rapports est donc primordiale. Un mauvais choix représenterait donc un déficit en terme de vitesse de pointe.
La ligne droite du départ se termine par un virage à gauche qui s’enchaine avec une longue courbe à droite en forme de « C ». Le moteur doit être fluide dans cette section, sans pic de régime, puisque celui-ci sera d’environ 11 000 tours/minutes durant cinq secondes, la plus longue sollicitation à bas régime de ce circuit.
Le deuxième secteur est plus riche en freinages et accélérations, avec la chicane des virages 6 et 7 qui se poursuit par le droite-gauche rapide des virages 8 et 9. Les pilotes monteront sur les vibreurs pour gagner du temps. Le moteur devra être souple et donner du répondant lorsqu’il sera sollicité dans les points de corde. Ce secteur est le plus long en terme de temps.
Le virage en épingle à cheveux qui suit contraint les voitures à ralentir à l’extrême, sous les 60 km/h. Elles réaccélèrent rapidement pour affronter une ligne droite de plus d’un kilomètre (1046 mètres), jusqu’au virage 13, célèbre pour son « mur des Champions ». Les pilotes atteignent ici les 320 km/h avec le DRS activé en qualifications, et plus de 300 km/h en course. La cartographie moteur sera optimisée pour apporter de la puissance en sortie de virage, tout en permettant de fournir la puissance nécessaire pour atteindre la vitesse maximale en bout de ligne droite.
Les fortes zones de freinage au niveau de l’épingle et de la chicane demandent une grande efficacité du frein moteur mais permettent également de recharger pleinement le KERS. L’énergie stockée peut être utilisée deux fois dans les lignes droites. Sur ce circuit particulièrement adaptée à la restitution d’énergie, l’avantage apporté par le KERS sera encore plus grand qu’à l’accoutumée.
Le point de vue des pilotes : Bruno Senna, Williams F1 Team
Cela va sans dire : la puissance à haut-régime est importante pour la longue ligne droite, autant que le couple pour les courtes portions d’accélération entre les virages 3 et 9. Ce passage ressemble à une suite de départs arrêtés. Nous avons besoin d’un moteur très disponible. Il est possible de gagner ou de perdre du temps selon le temps de réponse. Le frein-moteur est aussi important pour la chicane et l’épingle... Surtout lorsque l’on entre dans un virage après un très gros freinage. La piste canadienne procure beaucoup de plaisir mais il faut être très précis à chaque virage car les murs sont très près et il y a plein de poussière et de gomme en dehors de la trajectoire.
Le point de vue des ingénieurs : Rémi Taffin, Responsable des Opérations Piste de Renault Sport F1
Les circuits de Monaco et du Canada ont des tracés très différents. Montréal est une des pistes qui met le plus en valeur la puissance des moteurs. C’est même un facteur déterminant. Le temps passé à pleine charge n’est pas aussi important qu’à Monza ou Spa, mais les longues lignes droites réclament de la puissance à haut-régime sur de longues distances.
Avec de grosses zones de freinage à l’épingle et à la chicane, le RS27 doit également proposer un frein-moteur efficace. Ce n’est pas sans raison que cette piste est connue pour être « casse-moteur ». Il n’a pas le temps de souffler ! Le défi est de trouver le bon compromis entre la performance maximum et une fiabilité de 100%. Comme à Spa et à Monza, les risques que nous pourrions prendre doivent être justifiés par des progrès tangibles.
Avec l’Australie, la quantité d’essence au départ est l’une des plus importantes de la saison. Ce paramètre dépend également de la stratégie de course et de la météo qui, comme nous avons pu le vérifier l’an passé, peut brusquement changer. Montréal n’est peut-être pas aussi spécifique que Monaco en termes de préparation, mais de bons réglages peuvent faire la différence entre les avant-postes et le milieu du peloton. Surtout durant une saison aussi serrée que celle que nous vivons en ce moment !