Le GP de Monaco vu par Renault Sport F1

Présentation côté moteur

Par Franck Drui

25 mai 2011 - 12:44
Le GP de Monaco vu par Renault Sport F1

À peine une semaine après le Grand Prix d’Espagne se déroule le joyau de la couronne de la Formule 1 – le Grand Prix de Monaco. Utilisant les rues de Monte-Carlo, le circuit de 3,340 km emprunte certaines des plus célèbres artères de la Principauté, passant devant des sites aussi célèbres que le casino ou le port affichant complet et abritant certains des plus grands yachts au monde.

Pour Renault Sport F1 cela ressemble à une course à domicile mais c’est également celle où elle a obtenu certains de ses résultats les plus notables en tant que motoriste. En 2010, le RS27 a scellé un triplé historique avec Mark Webber (Red Bull Racing) qui l’emporta depuis la pole position, devant Sebastian Vettel et Robert Kubica (Renault F1 Team). Les moteurs Renault ont remporté trois autres victoires à Monaco : en 1995 avec Michael Schumacher (Benetton-Renault), en 2004 avec Jarno Trulli et en 2006 avec Fernando Alonso (Renault F1 Team pour les deux). Un moteur Renault s’est également élancé dix fois depuis la pôle à Monaco.

Un tour du GP de Monaco côté moteur :

Le circuit urbain de Monte Carlo est très exigeant pour les pilotes, les équipes et les moteurs qui cherchent à optimiser leurs paramètres pour négocier les rues tortueuses et bosselées de la Principauté. De fait, la vitesse moyenne sur le parcours de la course est la plus faible de la saison, 160 km/h seulement, avec une vitesse de pointe légèrement supérieure à 290 km/h.

Secteur un

Le sprint jusqu’au premier virage depuis la pole position est le plus court de la saison : 140 mètres uniquement. Le détenteur de cette pole mettra quatre secondes environ pour couvrir la distance, ce qui ne permettra pas un usage complet du KERS. Les pilotes freinent ensuite jusqu’à 105 km/h pour le premier virage de Sainte Dévote avant de rapidement remettre de la puissance pour la courte montée de Beau Rivage jusqu’à la Place du Casino. Un moteur réactif est primordial ici et les cartographies moteur seront conçues pour fonctionner avec des rapports de boite courts pour atteindre le régime moteur maximal au sommet de la côte. Le KERS pourrait effectivement être utilisé sur cette « ligne droite » pendant la course, mais ses effets seraient annulés par la forte pente menant de Sainte Dévote au Casino – les voitures absorbent un dénivelé de plus de 30 m en 10 secs seulement.

Secteur deux

Ce secteur est particulièrement cahoteux et les voitures roulent hors trajectoire dans la descente du Casino vers Mirabeau pour éviter une bosse relativement imposante. Sur celle-ci, il ne s’agit pas que d’une question de déséquilibre – passer en plein milieu fait temporairement "décoller" la voiture, mais même s’il ne s’agit que d’une nano seconde, sans charge au niveau des roues le moteur atteint sa limite de régime, ce qui soumet les pièces internes du moteur à un énorme stress.

De Mirabeau les voitures plongent vers l’épingle du Grand Hôtel (anciennement appelé l’épingle du Loews), atteignant ici leur vitesse et leurs tours/minute les plus bas de toute la saison, 44 km/h seulement dans cette courbe très serrée. Le couple et la réactivité du moteur sont ici cruciaux car les vitesses d’entrée et de sortie peuvent faire gagner ou perdre un nombre substantiel de secondes. Le pilote doit être certain que quand il met son pied sur l’accélérateur le moteur réponde à son injonction.

Les voitures prennent ensuite un virage à droite pour entamer la section la plus rapide du circuit – celle du tunnel, où les voitures atteindront leur vitesse maximale et la limite haute de leur régime moteur pendant environ huit à neuf secondes. Encore une fois, un moteur nerveux ayant les bonnes cartographies pour les bas régimes est déterminant pour bien réaccélérer - il n’y a que 670 m entre la sortie du Portier jusqu’à la chicane après le tunnel. Les voitures rouleront à environ 290 km/h à l’endroit le plus rapide de cette section. En théorie, le KERS pourrait être utilisé ici, mais surtout pour défendre une position plutôt que pour dépasser - rouler hors trajectoire ici est sérieusement ‘casse-cou’.

Alors que cette partie du tunnel offre une bouffée d’oxygène appréciée par le moteur lorsqu’il atteint sa vitesse de pointe, il ne s’agit pas d’air pur - la structure fermée du tunnel signifie que l’air arrivant dans le moteur via la boîte à air est aussi chaud que les températures ambiantes observées en Malaisie ou à Abu Dhabi.

Secteur trois

La dernière section entre le Tabac et la ligne d’arrivée comprend la plus grande quantité de virages et exige donc un moteur très réactif et souple. Les pilotes ont besoin de savoir que le moteur va fournir toute la puissance nécessaire dont ils auront besoin afin qu’ils puissent être au millimètre près dans les courbes de la piscine et de la Rascasse puis sur la ligne droite finale.

Rémi Taffin, responsable des opérations pistes de Renault Sport F1 :

En termes d’heures travaillées Monaco est la course où les ingénieurs RSF1 passent le plus de temps à préparer – quelque chose comme deux à quatre jours au banc et au bureau d’étude comparativement à une journée environ pour une course standard comme la Chine.

Bien que le tour ici soit le plus court de la saison et que le moteur passe relativement peu de temps à plein régime - un peu plus de 50% au tour en opposition à la Chine, où ce chiffre sera plus proche des 70% - le défi est de livrer un moteur très réactif et très souple pour les entrées et sorties des virages lents. Par conséquent, les ingénieurs travaillent sur des cartographies visant un couple optimisé aux alentours des limites basses du régime moteur (environ 15 - 17.000 tr / min) plutôt que pour ses limites hautes (16 - 18.000 tr / min).

Le nombre élevé de tours de circuit signifie que le moteur ne connaît pas de « répit » et, par conséquent, son refroidissement devient crucial. Nous ne pouvons pas nous permettre de créer des orifices d’aération ou d’ajouter des ouïes supplémentaires pour soulager - les virages serrés réclament de tels appuis que chaque centimètre carré de carrosserie influe sur les performances.

Notre challenge est d’amener le pilote à un niveau de confiance tel qu’il n’émette aucun commentaire sur le moteur, c’est à dire, il sait que ce dernier fera ce qu’il voudra qu’il fasse. Si vous arrivez à ce résultat, vous savez que vous avez fait votre travail !

Le saviez-vous...

Les ingénieurs moteur permettent au pilote de contrôler la quantité de carburant brûlé pendant la course en utilisant différents réglages activés par des molettes situées sur le volant. C’est toujours une question de bon dosage car l’équipe cherche à gagner en performance grâce à la consommation de carburant, mais aussi à terminer la course avec le moins de carburant possible. Avec l’avènement du KERS, du DRS, d’une usure plus importante des pneus et des arrêts aux stands plus fréquents en 2011, il est devenu beaucoup plus difficile de prévoir la consommation de carburant pour chaque tour. En conséquence de quoi, le pilote doit modifier les paramètres de consommation en moyenne trois fois plus fréquemment qu’en 2010 pour optimiser la charge de carburant de la fin de course.

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