Le 1000e GP à Shanghai, Silverstone en péril : 2019, année symbolique
La Chine plutôt que le Royaume-Uni, l’Asie plutôt que l’Europe : l’avenir de la F1 ?
Et de 1000 ! A Shanghai, cette année, se tiendra le 1000e Grand Prix de l’histoire de la F1. Pour l’occasion, Liberty Media devrait préparer des animations spéciales pour que ce week-end reste véritablement dans les mémoires.
2019 sera d’ailleurs historique à plus d’un titre : non seulement le 1000e Grand Prix aura lieu en Chine, mais encore, le circuit de Silverstone, qui avait accueilli le premier Grand Prix de l’histoire en 1950, pourrait bien ne plus être au calendrier dès 2020.
Or, le fait que le 1000e Grand Prix de l’histoire se tienne en Chine n’a rien du hasard. Il s’agit même du symbole de l’évolution de la F1 depuis plusieurs années : l’économie de la F1 se décentre, de l’Europe vers l’Asie et l’Amérique.
Liberty Media a certes cherché à organiser, pour l’occasion, le 1000e Grand Prix de l’histoire à Silverstone, en décalant l’épreuve de l’été à avril. Mais Sean Bratches, le directeur des opérations commerciales, a vite abandonné l’idée, notamment en raison de la météo à cette époque de l’année. La pluie et la boue sur les parkings pourraient en effet gâcher ce week-end historique.
Silverstone n’accueillera donc pas le 1000e Grand Prix de l’histoire, et pourrait même être rayé des calendriers futurs. Le BRDC, propriétaire du circuit, n’arrive plus à rentabiliser l’évènement et se retrouve lourdement déficitaire. Une clause de sortie a déjà activée par les promoteurs : si aucun accord n’est trouvé cette année, il n’y aura pas de Grand Prix à Silverstone en 2020. Le BRDC souhaite un contrat plus avantageux financièrement, mais Liberty Media n’est pas prêt à faire trop de concessions et regarde d’autres destinations en Angleterre, même si la piste londonienne reste encore brumeuse.
Pendant que les circuits européens ont du mal à boucler leurs budgets (Hockenheim est encore menacé), Liberty Media se tourne de plus en plus vers l’Asie et l’Amérique, vus comme les véritables relais de croissance à moyen terme.
« La Chine est un endroit formidable pour courir. La Chine fait partie de notre futur et nous sommes excités à l’idée de disputer ce Grand Prix spécial » déclarait ainsi récemment Sean Bratches.
La FOM a de plus officialisé qu’un Grand Prix se tiendrait dans les rues de Hanoï en 2020, tandis qu’une deuxième course aux États-Unis, probablement à Miami, devrait également être au programme dans les prochaines années.
« Le Vietnam est certainement l’un de ces pays qui se développe énormément en termes de tourisme et d’affaires » explique ainsi Chase Carey. « Nous voulons être dans ce que nous appelons des villes de destination, des pays de destination - des endroits qui peuvent capter l’imagination du monde, et le Vietnam est l’un de ces endroits. »
Le point de vue de Liberty Media est compréhensible : la F1 a besoin de développer son chiffre d’affaires, et les pays asiatiques comme la Chine ou le Vietnam sont des puissances économiques et démographiques en pleine croissance. La F1 a, de même, une marge de progression considérable dans le grand marché américain.
Liberty Media, groupe états-unien de surcroît, abandonne-t-il véritablement l’Europe dans ces conditions ? Le point de vue mérite d’être nuancé : Chase Carey a plusieurs fois rappelé que la F1 ne voulait pas délaisser l’Europe, car il considère que le « cœur historique », le « patrimoine » ou les « fondations » du sport, pour reprendre ses termes, doivent être préservés.
Mais ce discours traduit un impensé inquiétant pour l’Europe : le Vieux Continent est perçu, non pas comme un territoire d’opportunités économiques, où les relais de croissance se trouveraient, mais comme un simple patrimoine, dont la valeur est plus sentimentale qu’économique. Tout le contraire du « Nouveau Monde » américain et du continent asiatique.
2019 sera dès lors une année représentative de l’économie de la F1 et de la direction que souhaite lui donner Liberty Media : le cœur historique de la F1 peut être préservé, moyennant quelques sacrifices, mais pas si les conditions financières deviennent insoutenables (comme c’est le cas à Silverstone).
L’économie de la F1 ne fait en somme que rejoindre la dynamique de la mondialisation : les rentes historiques du Vieux Continent tendent à s’effacer peu à peu. Ce qui pose cette question : dans 30 ou 40 ans, combien de Grands Prix se tiendront encore en Europe ?
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