Interview : Rob Marshall, designer en chef de Red Bull (Part. 2)
Rencontre avec le designer en chef de l’écurie Infiniti Red Bull Racing
Rob, combien de fois la voiture est-elle modifiée au cours de la saison ?
C’est difficile à quantifier. Je dirais que l’on procède à quatre ou cinq changements majeurs, mais les autres modifications se font tout au long de la saison. D’une course à l’autre, il ne s’agit jamais exactement de la même voiture, voire même d’un jour à l’autre lors des semaines de Grand Prix. Nous tentons en permanence de faire progresser la carrosserie ou des éléments de suspension par exemple. Quasiment toutes les pièces sur la voiture sont amenées à être modifiées. Le nombre de dessins que nous produisons chaque année se compte par milliers.
Vous êtes rarement présent lors des Grand Prix, mais on vous a aperçu sur le podium en Australie. Quelle impression cela fait de se retrouver là-haut ?
C’est incroyable... Pour accéder au podium, vous devez passer par un couloir en contre-plaqué, puis une trappe s’ouvre et d’un coup, vous vous retrouvez face à cette foule. On se croirait plongé dans le monde d’Alice au pays des merveilles. Non, en fait on dirait plutôt une scène tirée de La Vie de Brian, lorsqu’il ouvre les volets...
Quand vous n’êtes pas sur place, comment faites-vous pour suivre la course ?
À ce stade du week-end, je ne peux plus faire grand chose, alors la plupart du temps, je suis la course à la télévision chez moi, ou à la radio, et je me ronge les ongles comme tout le monde.
Dans quel état était l’écurie à votre arrivée en 2007 ?
Nous avions fort à faire mais, vous savez, cela prend du temps d’entreprendre des changements majeurs. Tout n’était pas à jeter mais on ne pouvait certainement pas se contenter d’arrondir les angles. Parmi les choses qui me reviennent à l’esprit, je me souviens des difficultés que nous avons rencontrées avec la boîte de vitesses. C’était une vraie bombe à retardement. Même si elle tenait le coup une ou deux courses, on savait qu’elle finirait par nous lâcher car c’était inévitable. Il nous a fallu beaucoup d’efforts pour redresser la barre à ce niveau, et arriver à un stade où nous n’avons connu qu’un incident lors des quatre dernières années, contre un par course autrefois. Les exemples de cet ordre ne manquent pas et prouvent les efforts accomplis pour amener l’écurie là où elle est aujourd’hui.
En course auto, il existe un vieil adage qui veut que lorsqu’une voiture franchit la ligne d’arrivée sans tomber en pièces, cela veut dire qu’elle est sur-préparée. Vous tirez une certaine fierté des modifications apportées à la voiture ?
Absolument ! Il faut être constamment à la recherche de nouvelles idées pour faire gagner du poids à la voiture et, pour ce faire, le premier endroit ou regarder, c’est au niveau des pièces qui fonctionnent. Évidemment, nous n’avons pas la moindre envie de créer un problème là où il n’existe pas, mais cela ne coûte rien de regarder d’un peu plus près.
Notre fiabilité est une grande source de fierté, mais nous savons également que nous pourrions faire encore mieux. Chaque week-end, on trouve une longue liste de choses qui n’ont pas fonctionné. Parfois, la chance est avec vous. Je suis persuadé que cela vaut pour toutes les écuries mais il arrive que l’on termine des courses par miracle et que nous soyons les premiers surpris en voyant la voiture franchir la ligne d’arrivée.
Vous évoquez le facteur chance. Sur votre bureau, on trouve un pot d’échappement qui semble avoir pris un coup de marteau...
Il provient de la voiture de Seb lors du Grand Prix du Brésil de l’an passé. Il a pris une sacrée claque quand Sebastian a eu cet accrochage au premier tour. Normalement, la moindre bosse lors du transport suffit à ce que la pièce se brise en course et nous pousse à l’abandon. Et pourtant cette fois-là, il est parvenu à terminer la course avec cet échappement cabossé. Il avait été à deux doigts de casser la suspension arrière et les flancs des pneumatiques avaient bien failli être découpés en lambeaux. Mais il s’en est sorti et quelques tours plus tard, il était revenu en cinquième ou sixième position. Parfois, il faut compter sur sa chance. Bien sûr, le fait d’avoir été accroché dans un premier temps était un coup de malchance...