Calendrier allongé, budget capé : Vasseur se confie sur les projets de Liberty
Un oui mais…
Le Formula One Circus enchaîne deux représentations en quelques jours, et ce rythme exigeant n’est pas sans incidence pour une structure plus petite comme Sauber. Dans le paddock de Monza, Frédéric Vasseur ne cache pas qu’il ne s’attend pas à un miracle en Italie, après une course déjà difficile sur un autre circuit rapide, Spa. Mais le Français nous confie lors d’une entrevue que Sauber pourrait tenter un coup stratégique en fonction de l’évolution de la météo…
« Les courses s’enchaînent, on est un peu dans la continuité. Cela fait deux circuits rapides, avec à peu après la même configuration. On ne s’attend pas à un week-end facile, à peu près identique à celui de Spa, à ceci près que la météo semble plus incertaine, donc ça laisse le choix pour savoir quoi faire dès le samedi.
« Au fil du week-end, on va voir la météo évoluer, et en fonction, on décidera pour le nouveau package aérodynamique. C’est une bonne nouvelle relative, la météo, parce qu’on passe d’un circuit ultra-rapide à un autre. Ce ne sera pas Singapour… »
Avec un moteur Ferrari datant de l’an dernier, Sauber aura la partie d’autant moins facile sur les longues lignes droites lombardes… Et qui plus est, la fiabilité ne suit pas.
« On a le moteur de 2016, toujours figé, on n’est pas embêté avec cette affaire de combustion d’huile ! On n’a pas de nouveau moteur pour Monza, non. On a eu quelques soucis à Spa, on verra bien. On a eu des problèmes techniques, dont un problème récurrent avec Pascal Wehrlein, de récupération d’énergie. On cherche, on aimerait bien savoir… »
Chez Renault comme chez Sauber, Frédéric Vasseur est arrivé dans deux écuries en transition et en reconstruction. Lorsque Nextgen-Auto.com lui demande si son style de management a pu ainsi facilement s’adapter à l’écurie suisse, le Français approuve.
« J’ai le même état d’esprit. Dans les deux cas, il y a des points communs. Des équipes historiques, basées sur des gens passionnés, qui ont à peu près la même taille (chez Renault quand je suis arrivé), avec les mêmes besoins de recrutement. Sauf qu’avec Renault, on appartenait à un constructeur, avec les avantages et les inconvénients, là, c’est une structure plus agile. Mais l’approche est la même, la recherche de la performance, par le renforcement dans tous les domaines, aérodynamique, mécanique… »
Pour ce qui est du développement de cette saison, Sauber passe 2017 pour pertes et profits et se concentre d’ores et déjà sur l’an prochain.
« On a totalement basculé sur 2018, je pense que c’est à peu près le cas chez pas mal de monde je pense. Sauf pour le milieu de grille où c’est très serré, le moindre petit gain peut être décisif, avec un gros potentiel. Ils peuvent assez facilement passer de 9e à 5e, donc dans ce cadre-là, ça vaut le coup. Là, on a intérêt à rester plus concentré sur l’an prochain. Mais ce qu’on fait en soufflerie, avec les délais de production, ça nous amène vraiment aux dernières courses. Alors comme nous avons des courses d’affilée en ce moment, c’est plus difficile d’introduire ces évolutions. »
Si le calendrier passe à 25 courses comme le souhaite Liberty, le rythme de développement sera d’autant plus infernal. Une mauvaise nouvelle de plus pour Sauber ?
« Je comprends la stratégie de la FOM, les besoins. Comme c’est notre plus gros client… Augmenter le nombre de courses, pourquoi pas ? Je ne suis pas vraiment contre. Ce qui me fait peur, c’est l’augmentation du nombre de courses petit à petit. Le risque, c’est de ne jamais prendre la décision de passer à la constitution d’une deuxième équipe. Au bout d’un moment… Les gens tirent déjà un peu la langue, donc c’est déjà dur. A un moment donné, ce sera intenable pour les personnes qui se déplacent. »
« On pourrait faire un roulement, ça peut se faire en moins de deux ou trois ans au niveau de la visibilité. Nous, on sera quand même drivé par le budget. Sauf augmentation de revenus, on ne franchira jamais le cap. La réduction des coûts, elle est à iso-périmètre, tant qu’on a plus de revenus, on est OK pour augmenter les coûts. Une équipe de course [en présentiel sur un Grand Prix], c’est 60 personnes sur 400 ou 1000 personnes. »
« Le plafond pour les budgets ? Je n’y crois pas trop. Ce qu’il faut, c’est contraindre les plus grosses écuries à dépenser moins d’argent. Si on avait plus de parties standard sur la voiture, ça permettrait aux petites équipes de réduire nos coûts de développement, et pour les autres équipes aussi. Et puis ça resserrerait davantage la grille, ça serait plus intéressant pour les téléspectateurs. C’est plus cette voie qui doit être investiguée. »
« Les gens hurlent, parce que les règlements en F1 c’est fait pour les ingénieurs, et il ne faut jamais donner un crayon à un ingénieur – je suis bien placé pour le dire. C’était impossible soi-disant pour les boîtiers électroniques avant, et maintenant, tout le monde a un boîtier McLaren, et cela nous coûte beaucoup moins cher qu’il y a dix ou quinze ans. Maintenant, si on dit qu’on va faire la même boîte, ou les mêmes freins pour tout le monde, il y a un moment donné où quelqu’un va croire qu’il aura la meilleure boîte de vitesses du plateau. »
En dépit de ce système, faire le grand saut de la F2 à la F1 demeure une affaire considérable. Günther Steiner confiait mardi dernier qu’il ne voyait pas une équipe de F2 pouvoir rentrer en F1 même en adoptant le modèle de sous-traitance de l’écurie américaine. Frédéric Vasseur, qui fut le directeur de ART Grand Prix, a-t-il la même opinion ?
« Je ne connais pas le modèle de Haas et je ne dois pas le connaître. Non, il y a quand même une marche énorme, et elle n’est pas que technique, même si c’est un problème. On n’aurait pas besoin d’être une armée, mais le problème est budgétaire. Une entreprise qui fait 5 millions de chiffre d’affaires, et qui pourrait en faire cent fois plus… je ne connais pas une entreprise qui pourrait le faire du jour au lendemain. Le saut de la F2 à la F1 me paraît complètement utopique. »