Allan McNish, la saison 2016 et les Grands Prix en Europe

Les filières de pilotes européennes pourraient être touchées à terme

Par Franck Drui

7 octobre 2015 - 17:46
Allan McNish, la saison 2016 et (...)

C’est une période trouble pour les circuits européens en Formule 1 : les problèmes financiers et des audiences faibles ont eu raison de l’édition 2015 du Grand Prix d’Allemagne, Monza n’est assuré d’organiser sa course que jusqu’en 2016 et le doute persiste pour Silverstone, malgré un contrat jusqu’en 2026 et une première clause d’annulation en 2019 seulement. Et avec tous les nouveaux circuits et un calendrier 2016 plus que chargé, l’ancien pilote Toyota Allan McNish se demande si la Formule 1 n’est pas entrain de perdre son âme…

« L’Europe constitue le cœur de la F1, en termes d’équipes, de pilotes et d’audiences. Et malgré cela, l’avenir d’un certain nombre de pays hôtes est incertain. 40 Grands Prix se sont tenus sur le Nürburgring, 34 à Hockenheim, 49 à Silverstone. Monza est présent presque continuellement depuis 1922. Ces circuits ont une longue et riche histoire et ont inspiré des générations d’équipes, de pilotes et de fans. »

« Je n’oublierai certainement jamais ma première visite au Grand Prix de Silverstone : c’était en 1987, au moment de la lutte entre Nigel Mansell et Nelson Piquet. Je me tenais sur l’herbe entre les virages Club et Abbey et n’ai donc pas pu voir Mansell reprendre la première place avec sa célèbre feinte dans Stowe. Mais j’ai su que ça s’était passé en entendant le rugissement de la foule. J’étais simplement un gamin qui venait d’avoir son permis, mais c’est resté depuis lors dans ma tête. »

« C’était pareil la première fois que j’ai piloté à Monza, dans des Formule 3000 sans ailerons arrière à cause des longues lignes droites, ou quand j’ai entendu James Hunt comparer l’ancien tracé de Hockenheim au nouveau en 1988. Tous ces circuits sont pleins d’anecdotes, d’histoire et de caractère, avec des virages qu’on appelle toujours par leur nom et pas un numéro, ce qui manque aux circuits récents. »

«  Beaucoup de ces tracés modernes sont financés par des gouvernements cherchant à faire leur promotion, et quand les caisses sont vides, la course s’arrête parce que le circuit ne peut assumer les coûts tout seul. Et toute chance de bâtir une culture des sports mécaniques s’évanouit alors. »

Auparavant préservés par les Accords Concorde, les circuits ‘classiques’ ne sont plus intouchables, et la perte d’un Grand Prix n’est pas sans conséquences pour son pays organisateur.

« Les Grand Prix historiques sont à mes yeux le battement de cœur de la F1. Mais ils ne sont plus protégés et peuvent disparaître du calendrier. Si un pays européen majeur perd sa course, il est inévitable qu’il perdra pied dans le monde des sports mécaniques à terme. Et avec ça, la filière de pilotes concernés se tarira aussi. »

« Évidemment, la F1 a besoin de revenus. Mais ce serait terriblement mauvais de perdre ces courses historiques pour une histoire de gros sous et il faut se demander si l’argent n’est pas devenu le seul facteur de prise de décisions concernant l’avenir de la discipline. »

McNish se pose aussi des questions sur la saison 2016, qui s’annonce fort chargée.

« La F1 vivra sa plus longue saison en 2016, avec 21 courses. C’est presque un Grand Prix toutes les deux semaines mais condensé sur une période de moins de 9 mois. Il y a évidemment bien moins d’épreuves que de matches de football en Premier League ou même de courses de NASCAR, mais ces deux championnats se tiennent sur une zone géographique bien plus réduite et il est plus facile de les gérer, tant d’un point de vue logistique que physique pour les personnes concernées. »

« Mais les effets néfastes sur les participants ne sont qu’un aspect de cette longue saison. Certains avancent en effet que 21 courses, c’est trop, qu’un Grand Prix devrait être un évènement particulier et que plus il y en a, moins chaque course est remarquable. D’autres estiment au contraire que plus il y a de Grands Prix, plus les équipes récupèrent d’argent et plus la discipline est exposée dans les médias, tout particulièrement dans les nouvelles destinations. Et se rendre là-bas est primordial pour la santé future de la F1. »

Les arguments se tiennent, mais une tendance se dessine cependant : la part des courses historiques en Europe ne cessent de diminuer d’année en année.

« Les écuries sont toutes basées en Europe. Mais 11 des 21 courses de 2016 se tiendront en dehors de ses frontières, et ce chiffre monte même à 13 si on y inclut la Russie et l’Azerbaïdjan qui, bien que techniquement en Europe, sont suffisamment éloignés géographiquement pour être considérés comme des courses au long cours. »

« Il y a 10 ans, nous avions 19 Grands Prix dont 11 en Europe. La direction que prend la F1 est très claire au vu de ce changement qui s’est produit en relativement peu de temps. Il y a globalement une dynamique qui fait qu’en ce moment, l’Europe semble moins apte à financer de grands évènements, en même temps que les autres parties du monde en sont davantage capables. »

« Je ne suis pas du tout opposé à de nouveaux horizons, mais je pense que la F1 doit faire attention à ne pas perdre ses valeurs fondamentales et ne pas inclure toujours plus de courses sans mesurer l’impact a court et long terme. »

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