Suzuka, un véritable défi pour les moteurs turbo

Renault nous explique cela

Par Franck Drui

30 septembre 2014 - 15:29
Suzuka, un véritable défi pour les (...)

Rémi Taffin, responsable des activités piste de Renault Sport F1, évoque le défi du circuit de Suzuka pour les moteurs.

« Suzuka reste l’un des monuments du calendrier, un circuit emblématique et redoutable qui propose un véritable défi, aussi bien aux pilotes, qu’aux ingénieurs et responsables de la stratégie. Nous devons optimiser toutes les pièces de la voiture pour qu’elles répondent aux contraintes générées par les courbes négociées à haute vitesse, les longues périodes de pleine charge, et les virages en épingle. Trouver la meilleure harmonie possible entre le châssis et le groupe propulseur se révélera particulièrement payant.

Le défi proposé par le tracé japonais se divise en deux parties bien distinctes. La plupart des virages se situent dans le premier secteur du circuit, tandis que la puissance joue un rôle crucial dans la seconde moitié. Par conséquent, tous les composants du groupe propulseur seront soumis à un véritable examen de passage et devront fonctionner parfaitement.

Le premier moment de bravoure du tracé interviendra dès les Esses, une série de courbes où le pilote jouera avec l’accélérateur tout en changeant de direction à haute vitesse. Comme à Silverstone – au niveau de Maggotts et Becketts – il abordera l’enchaînement à environ 245 km/h et devra conserver cette vitesse jusqu’au bout. Sur cette portion du circuit, il passera près de 15 secondes en cinquième ou sixième vitesse. Le pilote devant changer de direction rapidement et relâcher l’accélérateur par à-coups, il lui faudra une voiture au comportement neutre, et qui offre une bonne motricité sur l’ensemble de la plage de couple. Dans ce secteur, le MGU-H aura pleinement le temps de récupérer de l’énergie au niveau de l’échappement puisque ce dernier y développera un flux constant. La seconde génératrice électrique pourra également faire le plein d’énergie lorsque le pilote effleurera la pédale de freins. Le MGU-K disposera toutefois de meilleures opportunités plus loin, d’abord au niveau de l’épingle, puis à la chicane qui conclut le tour.

La seconde moitié du circuit mettra à rude épreuve le moteur à combustion interne ainsi que le turbocompresseur. La portion qui débute au virage 14, emprunte le formidable virage du 130R, et file jusqu’à la chicane finale, s’étend sur 1 250 m, et le pilote n’y lèvera jamais le pied. À pleine charge, il lui faudra près de 17 secondes pour couvrir cette distance, soit 75 mètres parcourus en une seconde. Au cœur du moteur à combustion interne, les pistons effectueront 200 rotations par seconde, une vitesse incroyable qui générera des forces internes colossales.

Au vu des contraintes exercées sur l’ensemble des pièces, nous utiliserons autant que possible des composants neufs lors de ce rendez-vous. À ce stade de la saison, la fiabilité va commencer à jouer un rôle déterminant au niveau des résultats. Toutes les équipes et pilotes ont dû utiliser leurs groupes propulseurs « à la carte » au fur et à mesure que nous en apprenions plus sur le fonctionnement de ces nouveaux blocs 2014. Il se peut que certaines écuries décident de conserver plusieurs atouts dans leur jeu, c’est-à-dire de couvrir moins de kilomètres en essais libres afin d’économiser des moteurs pour les dernières courses de la saison.

Nous nous montrons néanmoins relativement confiants dans ce domaine puisque nous avons déjà décidé d’introduire un sixième groupe propulseur en cas de besoin. Nous disposons désormais d’un tableau de marche beaucoup plus clair. Certes, devoir utiliser de nouvelles pièces et subir des pénalités n’est pas une situation idéale, mais nous pouvons le faire sur des courses où l’impact se révélera minime. Nous pensons que Suzuka représentera un beau défi, mais restons sereins et avons hâte de le relever. »

Les données chiffrées :

62% du tour se négocient à plein régime, mais la majorité des périodes de pleine charge interviennent dans la seconde moitié du tracé. En fonction de la direction du vent, les vitesses de pointe pourront alors dépasser les 330 km/h, soit parmi les plus élevées de la deuxième partie de saison.

Les freinages appuyés, accélérations fréquentes et secteurs à haute vitesse de Suzuka pousseront la consommation de carburant à l’extrême limite. Les MGU-K et MGU-H disposeront cependant de suffisamment d’opportunités pour récolter de l’énergie au freinage et à l’échappement et recharger ainsi la batterie. Ceci permettra de maintenir la consommation d’essence en dessous de la limite réglementaire. Comme à Silverstone, il se peut que nous utilisions le phénomène de « surcharge moteur », où nous injectons légèrement plus d’essence dans le moteur à combustion interne que nécessaire. En fonctionnant avec un débit de carburant plus élevé, le V6 délivre une puissance accrue, ce qui permet ensuite aux MGU-K et MGU-H de récolter plus d’énergie pour recharger la batterie. Au final, cette technique permet à la voiture d’offrir un meilleur rendement.

Même si Suzuka reste célèbre pour ses courbes à haute vitesse, les secteurs moins rapides nécessitent également une préparation minutieuse. Le Virage 11, celui en épingle, se prend à environ 65 km/h. Le défi consiste alors à donner au pilote le meilleur couple possible au moment requis. Une bonne distribution de couple permet d’éviter que les pneus ne patinent lorsque l’adhérence est faible, particulièrement sur piste humide.

Suzuka présente un certain dénivelé, notamment au niveau du 130R où la piste monte très sensiblement. C’est surtout le turbocompresseur qui subit les conséquences de ce changement d’altitude : sa vitesse de rotation sera en effet plus élevée au sommet de la pente mais il devra toujours offrir le même niveau de puissance. Les ingénieurs prendront en compte ce facteur lorsqu’ils étudieront les cartographies moteur pour niveler la souplesse du propulseur sur l’ensemble du tour.

Les moteurs Renault ont remporté neuf des 25 Grands Prix disputés à Suzuka, soit un taux de victoire de 36%. Sebastian Vettel reste le pilote qui a connu le plus de succès au Japon ces dernières années puisque l’Allemand a gagné quatre des cinq dernières éditions à l’aide du moteur V8 Renault.

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