Les sports américains peuvent-ils servir de modèle à la F1 ?

Les nouveaux propriétaires y croient

Par Emmanuel Touzot

24 septembre 2016 - 14:07
Les sports américains peuvent-ils (...)

Les récentes déclarations de Liberty Media au sujet du rachat de la Formule 1 ne laissent que peu de doutes, les Américains veulent faire de la F1 un sport du 21e siècle !

Greg Maffei, PDG de l’entreprise qui en détient désormais les droits, déclarait cette semaine que la F1 devait mieux redistribuer ses revenus, notamment grâce à un rôle plus important joué par les supports numériques. La FIA a autorisé timidement le public à participer en votant pour le meilleur pilote de chaque course, mais on est loin de ce qui se fait aux Etats-Unis dans l’interaction entre les sports et leurs fans.

A commencer par les sports collectifs, tels le football américain, le baseball et le basket, qui tendent chaque saison à réduire l’écart entre l’expérience vécue par les spectateurs et celle des téléspectateurs.

Les chaînes américaines proposent des journées dédiées aux sports, grâce à des multiplexes et grâce à de nombreux intervenants qui font vivre les sports de l’intérieur, comme le fait Sky en Angleterre pour la F1, mais sur des canaux gratuits. Cette idée d’offrir au spectateur un temps dédié, qui pourrait s’allonger à la carte, permettrait que chacun ajuste ses options en fonction de ce qu’il veut regarder.

Le côté fédérateur de la NFL, la fédération de football américain, vient aussi des rendez-vous incontournables qu’il propose, tels que le ’thursday night football’ et le ’monday night football’ qui ouvrent et clôturent chaque semaine. Mais pour que la recette prenne, il a fallu un grand travail commun de la fédération et des diffuseurs, en partenariat avec les annonceurs. Ces derniers se positionnent directement dans le jeu, à l’exemple de Pepsi qui sponsorise la mi-temps du SuperBowl au point de lui donner son nom, le ’Pepsi Halftime Show’.

Ces derniers détiennent évidemment la clé des moyens qui peuvent être injectés dans une meilleure expérience et comme le disait Maffei, seules trois personnes travaillent sur les contrats de publicité en Formule 1 pour un total de 17 sponsors, là où les équipes de baseball possèdent 75 partenaires.

Les sports mécaniques ne sont pas non plus en reste, notamment l’Indycar qui se sert des sponsors et des partenaires qui achètent les pages de publicité pour ne pas gêner les spectateurs. On voit très souvent, lors des pages de publicité, un double écran qui diffuse les spots tout en laissant tourner l’image de la course, afin de ne pas pénaliser les téléspectateurs tout en satisfaisant aux gros contrats passés.

La Nascar fonctionne encore différemment, puisque les sponsors sont des acteurs à part entière du championnat. Les trois catégories de la Nascar sont sponsorisées chacune par un annonceur, comme la célèbre Sprint Cup Series qui est la discipline reine et qui tire son nom de l’opérateur téléphonique partenaire, Sprint. C’est également le cas de l’Indycar, elle aussi nommée par l’opérateur Verizon.

Mais la Nascar pousse le vice plus loin, chacune des 36 courses à l’exception des Daytona 500 prend le nom d’un sponsor, comme le Coca Cola 600, course de 600 miles soutenue par la célèbre boisson.

Bien évidemment, tout cela s’inscrit dans un contexte de publicités à foison qui sont diffusées tout au long des courses, en sports mécaniques, et des matchs pour les sports collectifs. En Nascar, les statistiques sont sponsorisées également puisque là aussi, c’est Sprint qui présente le pilote qui a effectué la meilleure remontée, le plus de dépassement, ou le tour le plus rapide.

La F1 a signé le premier contrat du genre cette saison avec Heineken, qui a donné son nom au Grand Prix d’Italie et bardé le circuit italien, ainsi que le circuit de Montréal, de ses couleurs. Toutefois, on est loin des revenus générés par la publicité aux Etats-Unis qui profite bien plus aux annonceurs, par exemple lorsque Toyota diffuse le spot publicitaire pour sa nouvelle Berline pendant les trois heures d’une course de Nascar.

La F1 qui est pourtant une machine financière énorme est frileuse à l’idée de faire investir des partenaires plus nombreux qui profiteraient eux aussi des retombées. Si plus d’argent rentrait, la FIA pourrait aussi proposer elle-même des abonnements comme le fait la NFL au travers du Game Pass. Pour 150 dollars, les fans peuvent regarder les matchs en direct, mais aussi les revoir en replay, voir des résumés et des statistiques plus complètes.

Bien sûr, des arrangements sont trouvés pour ne pas léser les diffuseurs, ce que devrait faire la F1 si elle adoptait un tel système. Mais si Liberty Media réfléchit aux médias numériques et parle de recruter des responsables du sponsoring, c’est bien pour s’approcher d’un fonctionnement dans ce genre.

Une chose est sûre, la Formule 1 est en retard sur les sports américains du point de vue de la communication et de ce qui est proposé aux fans, à commencer par une diffusion basique gratuite qui fait défaut à la F1 aujourd’hui. Payer pour une expérience plus complète, comme le proposait CanalSat en France au début des années 2000, est logique, mais payer pour une diffusion de l’événement fait beaucoup de tort à un sport qui est en perte de vitesse.

Le rôle du nouveau propriétaire sera donc de réfléchir à des offres alternatives sur le plan de la diffusion, mais également pour attirer des partenaires plus importants qui pourront proposer des animations sur les circuits. L’argent généré pourrait servir également à baisser le prix des places sur les circuits, très critiqué aujourd’hui, afin de raviver la flamme entre la F1 et son public.

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